À Barcelone, Ana accouche. Un commando surgit, s’empare du bébé, place une bombe dans le ventre de la maman et disparaît.
Depuis vingt ans, Ana, qui a survécu à l’explosion, cherche son enfant. Lorsque sa route croise celle de Joye, une Irlandaise poursuivit par son proxénète et ses tueurs, les deux femmes s’unissent.
Le second et dernier tome débute quand Joye, hospitalisée, couverte de pansements, prend connaissance, en compagnie d’un lieutenant de police, de l’histoire d’Ana, qui avait enregistré son témoignage sur une clé USB. Le policier se montre sceptique face aux révélations d’Ana, sur le fait qu’elle ait été enceinte sans jamais avoir eu de relations sexuelles. Il lui faudrait le témoignage de cette Magdalena, l’adolescente qui était avec elle quand cela s’est produit. Joye lui révèle qu’elle a retrouvé cette femme quand arrivent, dans la chambre, deux agents, respectivement de la CIA et du CNI espagnol. Sous le prétexte de s’habiller, Joye trompe les agents et s’enfuie, avec la complicité du lieutenant, dans la voiture de la Guardia civil.
Ana a été droguée. Elle se réveille dans un cadre qu’elle juge enchanteur. On lui a dit que son fils est là, qu’il se nomme Seydou. Son interlocuteur se félicite qu’elle trouve les lieux à son goût parce qu’elle va y rester jusqu’à la fin de ses jours.
Magdalena est mariée avec un roi du nettoyage industriel. Celui-ci la surprend en plein adultère et veut la tuer…
Ana en apprend plus sur son fils, ce qu’il représente aux yeux de ceux qui l’ont enlevé et élevé. Quand il lui révèle qu’il est une arme…
Les mythologies du monde entier font état de héros conçus sans que la mère ait eu des rapports sexuels, voire sans mère du tout : Adam, Ève, Gilgamesh, toute une kyrielle de dieux et demi-dieux grecs et romains, le Christ du Second testament… Et le scénariste pose la question : “Et si certains de ces mentors existaient encore ?” S’inspirant de ces fictions, Zidrou met en musique un récit où la procréation se fait par la pensée et un simple toucher d’un Mentor, comme la visite d’un Archange.
Il imagine alors une histoire vue par les femmes, par une mère qui n’aura de cesse de retrouver cet enfant venu de nulle part. Il l’entoure d’une galerie de protagonistes fort bien choisis, donnant toutefois des rôles positifs aux dames. Le scénariste les dote de la pugnacité des mères pour faire face à des structures qui traquent ces êtres hors du commun soit pour les détruire soit pour les asservir en vue de buts peu louables.
Une conclusion peu banale, conjuguant félicité et peine, termine de façon touchante ce diptyque. Zidrou offre un récit brillant, riche en rebondissements et en idées intéressantes, servi par des réflexions, des dialogues incisifs et pétillants d’humour, un humour souvent noir, voire grinçant. Un régal !
Francis Porcel assure un graphisme attractif, d’une réelle beauté tant pour les personnages que pour les décors. Il adapte son dessin aux circonvolutions du récit, donne des plans larges de belle facture, des portraits craquants des héroïnes. Il ne lésine pas sur les détails s’attachant à définir au mieux les lieux des actions.
Avec Les Mentors, Zidrou explore un nouvel univers, en extrait les principales composantes qu’il met en scène avec maestria et signe un scénario original. Francis Porcel, avec son graphisme, n’est pas en reste.
serge perraud
Zidrou (scénario) & Francis Porcel (dessin et couleurs), Les Mentors – t.02 : Seydou, Bamboo, coll. Grand Angle, janvier 2020, 48 p. – 14,50 €.