Yves Sente, Teun Berserik & Peter Van Dongen, Blake et Mortimer — La Vallée des immortels : t.02 — “Le Millième bras du Mékong”

L’esprit de Jacobs plane sur ce récit 

Le dip­tyque La Val­lée des Immor­tels entraîne les deux héros à Hong-Kong et dans les ter­ri­toires chi­nois proches de la fron­tière avec l’enclave bri­tan­nique. La période est dif­fi­cile. L’histoire débute quand le trône impé­rial chi­nois de Basam-Damdu, ins­tallé à Lhassa alors capi­tale de la Chine, s’effondre sous les bom­bar­de­ments des Espa­don.
Le reste du ter­ri­toire a été en proie à une guerre civile entre les com­mu­nistes de Mao Zedong et les Natio­na­listes de Tchang-Kaî-Chek. Ce der­nier s’est réfu­gié à For­mose empor­tant des tré­sors de la Chine antique. Pen­dant la tra­ver­sée, un des bateaux dis­pa­raît dans la tem­pête. Une par­tie de son contenu, cepen­dant, est récu­péré. Dans une sta­tuette, un docu­ment révèle com­ment, en 221 avant J.-C., Ying-Zheng, le maître du petit royaume de Qin, a conquis les six autres royaumes pour deve­nir le pre­mier empe­reur de Chine.

Entre en scène Xi-Li, un sei­gneur de la guerre qui, se fon­dant sur le récit exhumé, se déclare le légi­time des­cen­dant de ce pre­mier empe­reur. Les Bri­tan­niques sont inquiets car ces luttes gênent leur sacro-saint com­merce. Blake et Mor­ti­mer sont envoyés sur place pour par­ti­ci­per à la défense de la colonie.

Le second volet, Le Mil­lième bras du Mékong, débute quand Blake est dans les locaux de la police mari­time de Hong-Kong pour avoir des nou­velles de son ami Mor­ti­mer, enlevé tout récem­ment par les sbires de Xi-Li. Mis­ter Chase, dégui­se­ment sous lequel se cache le colo­nel Olrik, emmène le pro­fes­seur Mor­ti­mer incons­cient dans le coffre de sa voi­ture en direc­tion de la fron­tière chi­noise. Il retrouve les hommes de Xi-Li qui enferment le pri­son­nier dans la cabine d’un bateau. Là, il retrouve Han-Dié, le com­plice de Mis­ter Chou, le même qui l’a piégé. Celui-ci emporte au sei­gneur de la guerre les docu­ments racon­tant l’arrivée au pou­voir de Ying-Zheng.
Mor­ti­mer pro­fite de l’occasion pour se faire tra­duire ces der­niers. Quelques miles plus loin, le bateau entre en col­li­sion avec une barque sur laquelle le pro­fes­seur, regar­dant par le hublot, recon­nait une jeune femme. Il réus­sit à jeter un mes­sage dans la barque.
À Hong-Kong, Blake aidé de Miss Ylang-Ti, un agent de sécu­rité, se lance sur la piste de Mortimer…

Ce récit s’intercale entre la fin du Secret de l’Espadon et le début du Mys­tère de la Grande Pyra­mide. Jacobs avait le souci de se baser sur une docu­men­ta­tion la plus moderne pos­sible. Il situait, ainsi, ses his­toires à l’époque où elles étaient publiées dans Le Jour­nal de Tin­tin. Yves Sente place son intrigue dans la fenêtre dis­po­nible entre les deux, à une période où, effec­ti­ve­ment, Mao Zedong avait le pou­voir après la décla­ra­tion du 1er octobre 1949 dans laquelle il pro­cla­mait l’avènement de la Répu­blique Popu­laire de Chine.
On retrouve, dans ce récit tous les élé­ments qui ont sus­cité l’engouement pour ces per­son­nages et cette série. Les deux héros, tou­jours en pleine forme, luttent contre l’affreux méchant qui, depuis le début, leur donne du fil à retordre. Le scé­na­rio s’appuie sur une base his­to­rique solide dans un cadre cohé­rent, avec des inven­tions, de la tech­no­lo­gie d’avant-garde, des don­nées tein­tées de fan­tas­tique, des péri­pé­ties et des coups de théâtre comme s’il en pleu­vait. Dans cette his­toire le thème de l’immortalité, ce rêve de quelques-uns, est abordé. Outre des car­touches nar­ra­tifs consé­quents (cela change de ces planches seule­ment pour­vues de quelques phrases lapi­daires et d’onomatopées !), le scé­na­riste place quelques-unes des vieilles expres­sions que l’on prête aux “Bri­tish”, telles que Dam­ned, Of course, Good Lord

Le gra­phisme se par­tage entre Teun Ber­se­rik et Peter Van Don­gen, des spé­cia­listes de la ligne claire. Cha­cun réa­lise ses pages, du crayonné à l’encrage, se concer­tant tou­te­fois pour accor­der la cohé­rence des planches. Les cou­leurs sont du seul Peter Von Don­gen. Ils ont repris le trait de Jacobs pour un résul­tat éton­nant, réa­li­sant une superbe sym­biose.
Si les per­son­nages sont au top, ils ont su recréer un décor d’époque à par­tir de pho­tos prises à Hong-Kong à la fin des années 1940. Leurs traits fins, pré­cis, s’attachent à mettre en valeur un scé­na­rio attrac­tif, mariant avec brio his­toire, aven­tures, action, sus­pense, fantastique.

serge per­raud

Yves Sente (scé­na­rio), Teun Ber­se­rik (des­sin) & Peter Van Don­gen (des­sin et cou­leur), Blake et Mor­ti­merLa Val­lée des immor­tels : t.02 — Le Mil­lième bras du Mékong, Dar­gaud, novembre 2019, 56 p. – 15,95 €.

 

 

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