Éric Giacometti & Philippe Francq, Largo Winch — t.22 : “Les Voiles écarlates”

Un épi­sode par­ti­cu­liè­re­ment dense 

Dans un clip lar­ge­ment dif­fusé, une jeune chan­teuse se pâme pour Largo : “Oh, my Bad Largo… King of the world… Oh my Largo…”, etc. Cette écoute ajoute un souci sup­plé­men­taire au staff de l’entreprise qui craint les retom­bées du Flash Crash dont Largo est accusé. De plus, aucune nou­velle du trans­fert de ses titres de pro­priété à Vaduz.
Mais Largo a aussi ses propres sou­cis. Il est dans l’immeuble, pri­son­nier de Jonas, et doit trou­ver une solu­tion pour ne pas rôtir en com­pa­gnie de Mary Stri­cker la tra­deuse. Une femme, habillée en motarde, suit ses faits et gestes. Quand il peut se libé­rer, elle fait sau­ter le bâti­ment. Alors qu’il appelle N°2 pour orga­ni­ser une réunion d’urgence, il reçoit sur son smart­phone la photo de ses titres et un rendez-vous, le len­de­main, à Saint-Pétersbourg. Il demande à Mary de recher­cher, dans l’historique de Jonas, qui l’a manipulé.

Gess­ner ren­contre la motarde et, contre un gros vire­ment, lui remet, sur une clé l’historique de la séquence du Flash Crash. Sur place, Largo reçoit de nou­velles indi­ca­tions. Il se retrouve dans une rame de métro pri­va­ti­sée par le club des oli­garques de la ville. Vik­tor Pal­nine lui sou­haite la bien­ve­nue et il ren­contre Soco­liev avec qui il s’affronte. Pal­nine tire bru­ta­le­ment sur le frein, fait jeter des lacry­mo­gènes et c’est Kse­nia, l’impétueuse Direc­trice de com­mu­ni­ca­tion qui vient sor­tir Largo. Ils fuient…

Éric Gia­co­metti mul­ti­plie à l’envi tant les actions mus­clées aux­quelles il confronte son héros, et ses sou­tiens de cir­cons­tances, que les retour­ne­ments finan­ciers. Il jongle avec les pro­cé­dures bour­sières, qu’elles soient offi­cielles ou occultes. Si Largo doit s’opposer à des tueurs armés de maté­riels de des­truc­tion clas­siques, il doit faire face à d’autres pièges rele­vant du domaine éco­no­mique et à ses redou­tables requins, d’autant que ceux-ci n’ont pas besoins d’être proches de leur proie pour frap­per.
Ils peuvent mener leurs agis­se­ments de pillage bien à l’abri avec des maté­riels pas spé­cia­le­ment sophistiqués.

C’est depuis le 21e tome qu’Éric Gia­co­metti, qui pos­sède un savoir-faire cer­tain pour racon­ter une his­toire, a pris les rênes du scé­na­rio. Il suf­fit, pour s’en assu­rer, de lire la série des enquêtes d’Antoine Mar­cas, ce com­mis­saire de police franc-maçon, co-écrite avec Jacques Ravenne. Aussi, prendre la relève d’un monu­ment tel que Jean Van Hamme est un beau défi.
Il est pré­fé­rable d’éviter de faire des com­pa­rai­sons car cha­cun a son style, sa façon d’aborder les sujets en fonc­tion de son expé­rience per­son­nelle, de son vécu.

Ayant été pen­dant cinq ans au sein du ser­vice éco­no­mique du Pari­sien, on sent que les cou­rants et les enjeux finan­ciers sont fami­liers à Éric Gia­co­metti. Et il jongle avec les tous ces termes anglo-saxons qui font fureur dans l’univers de l’argent. Mais, au détour d’une page, il intègre des réfé­rences lit­té­raires comme le nom du Yacht de Pal­nine qui porte le titre d’un roman d’Alexandre Grine (1880 – 1932) Alye Parussa, Les Voiles écar­lates. C’est un livre très poé­tique par un auteur au par­cours sin­gu­lier.
Quant à Phi­lippe Francq, son des­sin est tou­jours aussi aiguisé dans ce style réa­liste qu’il sait si bien mettre en scène. Il offre des pages magni­fiques par ses décors, ses per­son­nages et à la mul­ti­tude d’actions toniques qu’il lui faut mettre en scène. Son trait fin, élé­gant, tou­jours juste est du plus bel effet. La mise en cou­leurs se par­tage entre lui et Ber­trand Denoulet.

Un nou­veau dip­tyque est d’ores et déjà annoncé en qua­trième de cou­ver­ture. Pour l’heure, ce vingt-deuxième album suf­fit à satis­faire notre envie de lire une bonne his­toire bien mou­ve­men­tée et si joli­ment mise en images.

serge per­raud

Éric Gia­co­metti (Scé­na­rio), Phi­lippe Francq (des­sin et cou­leurs) & Ber­trand Denou­let (cou­leurs), Largo Winch — t.22 : Les Voiles écar­lates, Dupuis, novembre 2019, 48 p. – 14,95 €.

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