La plus personnelle des nouvelles d’Howard ?
Ce septième tome de la série est une adaptation d’une des plus grandes nouvelles de Robert E. Howard mettant en scène Conan, d’après les exégètes de l’œuvre. On retrouve dans ce texte, qui ne fut accepté que quelques jours avant le suicide de l’écrivain, les thèmes récurrents de la barbarie contre la civilisation, de la décadence et de l’autodestruction. Ici, ils sont mis en avant avec un certain renforcement.
Howard expose une société fermée sur elle-même où chaque communauté s’entretue à qui mieux-mieux. Des clous rouges dénombrent les morts ennemis sur l’arbre de la vengeance. Régis Hautière livre une belle restitution du texte original, des idées exprimées mais aussi de celles qui sont esquissées, voire simplement suggérées. On retrouve dans ce texte nombre d’éléments de la vie personnelle d’Howard en cette année 1935.
Conan n’est encore qu’un mercenaire. Il est au Darfar, un territoire recouvert d’une immense forêt considérée comme maudite. Il s’est élevé jusqu’à un promontoire, découvrant un squelette. Il est rejoint par Valeria qui le menace de son épée. Elle pense qu’il fait partie de la meute lancée à ses trousses. Il la détrompe mais leur conversation est interrompue par le hennissement terrorisé d’un cheval. Redescendant, ils voient un énorme animal dévorer une monture. La chute malencontreuse d’une pierre attire l’attention de la bête qui se retourne contre eux. Réfugiés sur le promontoire, ils sont prisonniers. Valeria aperçoit, au loin, une cité. Conan engage le combat contre le monstre.
Ils peuvent pénétrer dans l’étrange cité faite d’une longue succession de salles plus ou moins gigantesques, mais sans ouvertures vers l’extérieur. Leur exploration les amène dans un hall où un homme implore la pitié d’un être dont la tête illumine et qui a bien l’intention de faire un sort à celui qui est devant lui. Valeria, qui a le coup d’épée facile et efficace, abat cette entité. Avant d’avoir plus d’explications, ils sont assaillis par un groupe fort menaçant…
Didier Cassegrain, avec son style inimitable, son trait élégant, précis, délicat, donne vie à ce héros, un héros un peu différent des mises en images antérieures, lui donnant un aspect plus humain, alors que nombre d’autres créateurs le représentent avec une face plus rude, plus brute. Si Régis Hautière met dans ses dialogues nombre de pointes d’humour, Didier Cassegrain en rajoute dans son dessin. Il possède, dans son crayon, un certain art pour rendre les actions musclées encore plus toniques et une capacité remarquable à créer un univers.
Comme dans chaque tome de la série, est adjoint un cahier fort instructif où sont précisées les conditions d’écriture du texte original, donne quelques planches-hommage de dessinateurs tels que Mohamed Aoumri, Olivier Vatine, Jérôme Lereculey…
Un prochain album est annoncé, Le peuple du cercle noir, avec Sylvain Runberg et Park Jae-Kwang. Que ce soit dans l’adaptation ou le graphisme, Régis Hautière et Didier Cassegrain se surpassent pour offrir un album puissant, d’une grande beauté.
serge perraud
Régis Hautière (adaptation et scénario d’après l’œuvre de Robert E. Howard), Olivier Vatine (story board et découpage) & Didier Cassegrain (dessin et couleur), Conan le Cimmérien : Les Clous rouges, Glénat, coll. “Conan le Cimmérien”, septembre 2019, 72 p. – 14,95 €.