Trafics de matières premières et de drogues…
Ce troisième et dernier volet de Reykjavik noir invite à suivre cinq principaux parcours qui vont finir par se rejoindre, se recouper pour le meilleur et pour le pire. Agla est en prison pour malversations. D’abord désespérée par l’abandon de Sonja, la femme de sa vie, elle va reprendre du mordant avec la mission qui va lui permettre de régler des comptes avec des ennemis. Anton, le fils d’Ingimar, veut briller aux yeux de celle qu’il aime. Maria a perdu, par la faute d’Agla, son emploi et son mari dont elle est toujours amoureuse.
Ingimar et son associé William qui profitent des opportunités ou qui les provoquent. Ils trempent, Agla en est persuadée, dans les difficultés d’approvisionnent en aluminium. Sonja qui réapparaît et qui semble jouer un rôle essentiel dans l’approvisionnement en drogue de l’Islande.
Dans sa cellule de la prison de Hólmsheidi, Agla est effrayée par ce qui l’attend à sa sortie toute proche. Les chagrins l’accablent et elle se pend.
Anton, qui veut préparer une action d’éclat pour l’anniversaire de Julia, sa petite amie, vole des explosifs, aidé par Gunnar son camarade.
Maria, qui anime L’écureuil, un journal en ligne, se voit refuser la visite à Agla. Pourtant, elle est sur un scoop et veut en savoir plus sur les relations de la prisonnière avec Ingimar Magnússon et William Tedd, un spéculateur basé à Paris. Mais la corde était assez longue pour qu’Agla tombe presque assise. Elle s’en sort horriblement marquée par cet échec plus que par sa trachée enflée. C’est en revenant dans sa cellule qu’elle trouve Elísa, une ex-toxico allongée sur son lit.
Ingimar a des soucis avec son épouse Rebekka qui oscille entre consommation alcoolique excessive et coma médicamenteux.
Elísa cherche le contact d’Agla, fait des approches. Celle-ci veut garder ses distances, comme avec ses codétenues, mais elle se laisse peu à peu apprivoiser. Elle travaille sur une mission confiée par un représentant d’une grande marque de soda, d’une compagnie d’informatique et d’une usine aéronautique. Ces sociétés ne trouvent plus d’aluminium sur le marché mondial aux cours fixés par le LME (London Metal Exchnage). Cette matière première n’est disponible que sur le marché libre où les prix… Son employeur veut qu’Agla trouve qui vide les stocks inscrits au LME. Elle demande à Maria, qui peut aller et venir, de l’aider à mener cette mission contre une somme que celle-ci ne peut refuser vu l’état de ses finances.
Mais les questions que pose Maria commencent à déranger…
Lilja Sigurdardóttir décrit avec réalisme les voies prises par ses protagonistes qu’elle entoure d’une belle galerie de personnages aux caractères élaborés. Elle excelle à construire et à décrire les profils tant psychologiques qu’intellectuels de ses héros. Cependant, il est frappant de constater que tous ratent leur vie sentimentale, leurs relations amoureuses.
Avec les magouilles financières qui renaissent de plus belle après la grave crise de 2008 qui a fortement secoué le système bancaire islandais, avec les trafics de drogue, de matières premières, la romancière construit une intrigue forte, d’une grande virtuosité qu’elle mène bien adroitement jusqu’à une conclusion originale. Elle démonte avec justesse les mécanismes financiers, les moyens de bloquer des approvisionnements, des tours de passe-passe pour faire des profits…
Parallèlement, elle fait une description du fonctionnement de la prison, de la vie des détenues qui semblent avoir un certain confort de vie malgré la privation de liberté. Elle insère nombre de réflexions intéressantes sur les milieux que fréquentent ses protagonistes, des milieux assez difficiles.
Avec La Cage, la romancière clôt une trilogie à la lecture addictive dont les livres peuvent être lus indépendamment les uns des autres.
serge perraud
Lilja Sigurdardóttir, La Cage (Búrið) traduit de l’islandais par Jean-Christophe Salaün, Éditions Métailié, Noir, coll. “Bibliothèque nordique”, mars 2019, 320 p. – 20,00 €.