Depuis novembre 2005, Anne Perry offre à ses lecteurs un volume de sa série Petits crimes de Noël où elle met en scène des personnages qui apparaissent dans ses deux principales sagas, à savoir Charlotte et Thomas Pitt et William Monk. Elle évoque à travers ses intrigues une partie du monde extérieur au Royaume-Uni.
Vespasia, issue de l’aristocratie anglaise, a rencontré Victor Narraway par l’intermédiaire de Thomas Pitt, il y a de nombreuses années. Cependant, ils ne sont mariés que depuis deux ans. En cadeau de Noël, il offre à son épouse un voyage en Terre Sainte en ce mois de décembre 1900. Comme il est trop tôt pour dîner dans leur hôtel de Jaffa, on propose au couple de patienter dans un des salons et de se joindre, près du feu, à un homme seul. Celui-ci se présente comme un astronome sans décliner d’identité. Pendant la conversation, puis pendant le dîner, Vespasia semble apercevoir une ombre qui les guette, mais si fugitivement.
Le lendemain, alors qu’ils visitent la ville, il croise un couple d’Anglais, font connaissance et dînent ensemble. En rentrant tard à leur hôtel, ils passent devant la chambre de l’astronome. La porte est entrebâillée. Intrigué, Victor la pousse et découvre l’homme avec la gorge tranchée, la chambre mise à sac. C’est seulement lorsqu’ils regagnent leur chambre que Victor trouve dans une poche de sa veste un morceau de parchemin. Il est accompagné d’un message lui enjoignant de remettre le manuscrit, à Jérusalem, la veille de Noël pour le plus grand bien de l’Humanité, car le Guetteur se rapproche…
Victor Narraway a dirigé la Special Branch et siège, maintenant à la chambre des Lords. Cependant, c’est au titre de son activité passée qu’il est régulièrement consulté pour des affaires délicates. Celle à laquelle il se trouve mêlé peut avoir deux origines. Si elle est politique, le Moyen-Orient n’est pas dans son champ d’expertise. Si elle est religieuse, c’est un domaine extrêmement sensible. Or, l’action semble avoir Jérusalem pour épicentre, le creuset des trois religions monothéistes.
Cependant, très vite, Vespasia s’interroge sur le hasard de leur présence. N’y-a-t-il pas une vérité cachée, une autre raison à ce voyage qu’un cadeau de Noël ?
Anne Perry, sans mettre la situation politique de la région au centre de son intrigue, développe quelques faits historiques intéressants et éclairants ainsi son récit. Elle intègre surtout l’esprit religieux, la spiritualité qui devrait se dégager dans un tel lieu et la symbolique chrétienne autour des Rois mages. Victor ne décide-t-il pas de baptiser Balthazar leur astronome ? Vespasia lui trouve également nombre de points communs avec le troisième Roi mage.
Mais la romancière n’oublie pas son intrigue et multiplie les mises en danger de ses héros, dans un fiacre, dans un train…
Avec un manuscrit ancien, façon puzzle, Anne Perry concocte un superbe récit, réussissant à intégrer la paix liée à la fête de Noël à une sombre histoire mettant en jeu de nombreuses dimensions mystérieuses.
serge perraud
Anne Perry, Un Noël à Jérusalem (A Christmas Message), traduit de l’anglais par Pascale Haas, Éditions 10/18, coll. “Grands Détectives” n° 5393, octobre 2018, 160 p. – 8,80 €.