Jean-Yves Le Naour, 1914–1918 L’Intégrale

La réfé­rence sur la Grande Guerre en un seul volume

Entre 2012 et 2016, les Édi­tions Per­rin ont fait paraître au rythme annuel, le tra­vail de Jean-Yves Le Naour sur la Grande Guerre. Chaque volume décri­vait de façon exhaus­tive les évé­ne­ments du conflit. Ce sont ces cinq volumes qui sont réunis dans cette intégrale.

Jean-Yves Le Naour donne une vision claire, lucide des évé­ne­ments et des pro­ta­go­nistes. Avec sa connais­sance ency­clo­pé­dique de la période, en coor­don­nant nombre de sources d’informations, en les rap­pro­chant, les syn­thé­ti­sant, assem­blant des faits, des décla­ra­tions, des articles de presse, il donne un éclai­rage com­plet sur la clique poli­tique, sur les États-majors et leurs guerres d’ego. Mais il n’oublie pas les acteurs du front, des offi­ciers subal­ternes à l’homme de troupe, ceux qui sont à l’arrière, tant du côté fran­çais, anglais qu’allemand.
Il brosse, de tous ces inter­ve­nants, des por­traits sai­sis­sants d’une grande finesse, les mon­trant dans leurs œuvres. Par exemple, pour Foch qui vient de se voir confier, en 1918, la coor­di­na­tion : “Foch en est réduit dans un pre­mier temps à ava­li­ser les déci­sions prises par Pétain et à faire du Foch, c’est-à-dire bras­ser de l’air et répé­ter les for­mules mariales de la défense pied à pied”. Il ana­lyse les situa­tions avec une acuité frap­pante. Ainsi, avec sa for­mule per­cu­tante “Le futur créant son propre passé”, il décrit le fait que cha­cun, lorsque la vic­toire est sur les rails, se congra­tu­lera de la réa­li­sa­tion de ce com­man­de­ment unique, sans recon­naître que la pater­nité en revient, bien mal­gré lui, à Ludendorff.

Avec des élé­ments his­to­riques de pre­mier ordre, avec un art consommé de la nar­ra­tion, l’historien offre un récit pal­pi­tant, vivant, tendu. On ne lâche pas ce livre, se pas­sion­nant pour l’évolution des situa­tions, pour des acteurs plus ou moins atta­chants dont on connaît, cepen­dant, la des­ti­née.
Ce diable d’historien pos­sède un tel art du récit qu’il réus­sit l’exploit de trans­for­mer la rela­tion his­to­rique en thril­ler, de nous faire pen­ser, bien que la conclu­sion soit connue, ancrée dans les mémoires, que la fin sera dif­fé­rente, de nous ame­ner à ima­gi­ner une autre conclusion.

Avec les cinq tomes de sa série, Jean-Yves Le Naour signe des récits vivants, d’une grande éru­di­tion, bref, du grand art nar­ra­tif appuyé sur une docu­men­ta­tion exhaustive.

serge per­raud

Jean-Yves Le Naour, 1914–1918 L’Intégrale, Per­rin, sep­tembre 2018, 1600 p. – 35,00 €.

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