Un nouveau diptyque prometteur
L’Étoile du désert est un diptyque paru en 1996, scénarisé par Stephen Desberg et dessiné par Enrico Marini. Les auteurs ont décidé de revenir dans cet univers, dans une préquelle pour donner vie à Étoile du Désert, absente des deux premiers albums. Si Stephen Desberg est toujours au scénario, Enrico Marini a laissé sa place à Hugues Labiano pour se charger de la direction artistique. Le choix initial des auteurs était de changer d’univers, en bousculant les lois du genre, avant de se lancer dans la Rome du Scorpion. Étoile du Désert s’appuyait sur l’histoire telle qu’elle s’est déroulée et sur la géographie de ce pays, de cet Ouest mythique. Et l’envie d’y revenir se faisait plus forte avec les années.
Fantôme de la Nuit, l’homme médecine de la tribu veille. Un convoi de colons est attaqué par une bande armée. Une mère ordonne à sa fille de fuir puis, sous le cow-boy qui la maintient au sol, se donne la mort pour arriver au ciel sans être souillée. Josh, le chef de la bande, demande à Garth de retrouver et tuer la gamine. Alors qu’il va le faire, la silhouette d’un indien s’interpose et l’homme tire.
Les années ont passé. Dans la tribu, l’homme médecine remarque Souffle du Matin qui se tient à l’écart des autres adolescents. Il est amoureux d’Étoile du Désert. Mais celle-ci préfère Ours Brun, un futur guerrier. Toutefois, ils restent des amis et c’est en se promenant qu’ils assistent à l’arrivée très attendue des bisons. Mais ils ne sont pas les seuls. Garth et un autre homme sont là. Étoile du Désert fonce sur eux revendiquant leur droit à la terre et rappelant que les Blancs n’ont pas à pénétrer sur leur territoire. Garth est battu, son compagnon s’est enfui. Quand il le retrouve, il l’abat pour que celui-ci ne révèle pas sa défaite face à la jeune indienne. Au village où Garth finit par arriver, un homme est revenu avec sa jeune fille. Il construit sa maison près de la tombe de sa femme et veut retrouver ses assassins de celle-ci.
Les fils des destins de tous ces personnages vont se croiser, se mêler dans un déchaînement de violence, une soif de vengeance.
Dans ce nouveau volet, le scénariste propose un récit moins linéaire et croise les fils narratifs des quatre acteurs principaux, à savoir : Garth le cow-boy, une jeune fille de pionniers, Étoile du Désert et Souffle du Matin. Avec ces quatre parcours, Desberg illustre une histoire dans l’Histoire avec pour cadre l’inexorable avancée des pionniers en marche vers l’Ouest, qui amènent un nouveau mode de vie à défaut d’une civilisation juste et humaine. Ce récit se situe quelques années avant le diptyque originel. On n’y trouve que des personnages nouveaux et la fameuse héroïne qui s’était suicidée avant le début de la saga. Desberg explicitera sans doute les causes et les raisons de cette fin.
Pris par d’autres travaux, Enrico Marini a su convaincre Hugues Labiano d’assurer le dessin et Jérôme Maffre la couleur. Le premier met en œuvre le scénario dans un paysage de plaines, de terres fertiles car les Indiens n’ont pas encore été repoussés dans les zones arides, décors de tant de westerns. Il donne une mise en page très travaillée, très réussie, à la lecture facile. Ses personnages, leur environnement s’appuient sur une documentation fouillée pour un résultat magnifique. La mise en couleurs complète avantageusement ce graphisme, celle-ci présentant, par exemple, des ciels changeant aux teintes subtiles, des éclairages plus durs quand un feu de camp illumine la scène.
Ce tome 3 renoue avec bonheur avec le début de la saga, une vision bien différente du genre, très éloignée de celle où évolue un John Wayne.
feuilleter l’album
serge perraud
Stephen Desberg (scénario), Hugues Labiano (dessin), Jérôme Maffre (couleurs) Enrico Marini (direction artistique), L’Étoile du Désert t. 3, Dargaud, septembre 2016, 56 p. – 13,99 €.