Xavier Dorison & Terry Dodson, Red Skin — t. 2 : “Jacky”

Quand la super­wo­man est… Russe !

Vera Yel­ni­kof, une Red Skin, est un agent de com­bat russe infil­tré, à la fin des années 1970, aux USA. Sous le nom d’Alabama Jane, elle a pour mis­sion de jouer les super-héros et de faire la pro­mo­tion de l’URSS. Parce qu’elle aime le sexe, elle s’est ins­tal­lée dans le sillage de Lew Gar­ner, un met­teur en scène de films X. Comme super-héroïne, elle est confron­tée au Char­pen­tier, un indi­vidu qui veut faire régner un ordre en tuant les com­mu­nistes et les per­vers. Il est le bras armé de la pas­teur Jacky Core.
Le second tome s’ouvre sur le com­bat que livre Red Skin face au Char­pen­tier alors qu’elle cherche à pro­té­ger une jeune femme sur le point d’accoucher. Le jus­ti­cier veut la tuer car elle porte le fruit du vice et du démon pour avoir for­ni­qué avec une femme. Red Skin a affaire à un rude adver­saire. Elle réus­sit cepen­dant à prendre l’avantage et il ter­mine au volant de sa voi­ture au fond du fleuve. A l’hôpital, elle doit lut­ter contre un autre dan­ger, les for­ma­li­tés admi­nis­tra­tives et la prise en charge finan­cière des soins. Lew inter­vient à temps… pour le méde­cin, en pro­po­sant de tout prendre en charge.
Sur les lieux où la voi­ture du Char­pen­tier a dis­paru, des fidèles sont venus avec Jacky Core, pour prier pour celui qui est leur modèle. Un paral­lèle est fait entre ce per­son­nage et celui de Farm, un vieux film sorti dans l’anonymat en 1947. Ce film, repris par Jacky Core dans ses églises, est en passe de deve­nir culte car c’est un modèle ins­piré par dieu.
A Mos­cou, les patrons de Vera s’impatientent. Ils veulent qu’elle soit plus popu­laire et pour cela pas­ser dans le talk-show de Jimmy Car­son, l’homme le plus influent du pays. Pour contrer les puri­tains, Lew décide de faire Farm X, un film si… que… Mais les puri­tains ont plus d’un tour dans leur béni­tier et leur roue­rie est sans limite.

Dans cette série, Xavier Dori­son ima­gine une héroïne aux goûts simples tels que siro­ter sa vodka pré­fé­rée, cou­cher avec qui elle a envie et rem­plir des mis­sions com­mando. Elle a été for­ma­tée pour être un sol­dat adepte de la manière forte, qui obéit à des consignes claires face à un ennemi iden­ti­fié. Jouer de diplo­ma­tie, se livrer à la comé­die n’est pas dans sa logique. Cette der­nière peut se résu­mer à ce qu’elle susurre à l’oreille de Jacky Core : “Le bon sol­dat ne meurt pas. Ni pour la cause, ni pour la patrie. Il reste en vie et mas­sacre le salaud d’en face.
Nour­rie de ces prin­cipes, le scé­na­riste la place dans une société qu’elle ne connaît pas, dont elle ignore le fonc­tion­ne­ment avec une mis­sion pour le moins dif­fi­cile à rem­plir dans ces condi­tions. Paral­lè­le­ment, il la confronte à une ambiance délé­tère, dépeint ce puri­ta­nisme hypo­crite prôné par des poli­ti­ciens qui n’y voient qu’un moyen de ser­vir leur ambi­tion, pour accé­der au pou­voir. Il montre l’importance de ces cou­rants appuyés sur quelques prin­cipes reli­gieux dans la société amé­ri­caine. Ils repré­sentent un poids tel qu’il inter­fère dans les déci­sions poli­tiques du pays.

Le scé­na­riste rap­proche son héroïne des super-héros anglo-saxons, joue avec les concepts et les règles des comics. Il en égra­tigne la repré­sen­ta­tion à l’aune de son héroïne quand celle-ci, s’imprégnant de cette culture, s’étonne : “Dans ce que tu m’as fait ache­ter, il y a au moins 1000 morts, 200 bles­sés, mais pas un sein.” Il s’amuse à décli­ner quelques situa­tions impro­bables comme Hulk dont seul le pan­ta­lon résiste lors de sa méta­mor­phose, alors que, comme le sup­pose l’héroïne, l’évolution doit se faire aussi en des­sous de la cein­ture pour atteindre de belles dimen­sions.
Terry Dod­son, qui œuvre dans les comics, est tout à fait à l’aise pour mettre en images cette héroïne aux courbes géné­reuses. Mais il reste dans la règle du genre, dévoi­lant avec par­ci­mo­nie la plas­tique de la gra­cieuse Vera. Par contre, il rend un gra­phisme sans faute, dyna­mique, de fort belle facture.

Dans ce second tome, la gale­rie de pro­ta­go­nistes gagne en pro­fon­deur, les per­son­nages s’étoffent, deviennent de plus en plus attrac­tifs, l’intrigue se muscle et s’intensifie avec une héroïne de toute beauté, dans tous les sens du terme. Une excel­lente décou­verte par deux créa­teurs à l’indéniable talent.

serge per­raud

Xavier Dori­son (scé­na­rio), Terry Dod­son (des­sin et cou­leur) & Rachel Dod­son (encrage), Red Skin, tome 2 : “Jacky”, Glé­nat, coll. Gra­fica, juin 2016, 56 p. – 14,50 €.

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