Mario Reading, Le Manuscrit du Temple

La pri­son de Salomon

John Hart et Johannes von Har­te­lius ont été les héros de La Pro­phé­tie des Tem­pliers où l’auteur relate les rai­sons qui unissent, avec neuf siècles d’écart, les deux hommes. Avec le pré­sent roman, Mario Rea­ding va plus loin dans la vie du jeune tem­plier et envoie John dans un guê­pier dont il aura le plus grand mal à se sor­tir. Il retient comme cadre le Moyen-Orient, cette région où se sont déchaî­nés, et où se déchaînent encore, aux noms de dieux de misé­ri­corde, les plus sor­dides pas­sions, les res­sen­ti­ments les plus tenaces. S’il place le début de son intrigue dans le Kur­dis­tan, il pour­suit les aven­tures de son héros en Irak, en Iran, alors que l’ex-templier reste sur les bords de la méditerranée.

John Hart, pho­to­jour­na­liste free-lance, est au Kur­dis­tan en com­pa­gnie de Nalan Abuna, guide et tra­duc­trice. Une voi­ture pié­gée explose tout près d’eux et les auteurs de l’attentat traquent les sur­vi­vants. Nalan entraîne John dans le musée Amna Sur­aka, l’ancienne mai­son de tor­tures de Sad­dam. Etonné qu’elle connaisse si bien les lieux, elle révèle y avoir été enfer­mée, avec ses parents, lorsqu’elle était gamine. Dans un gre­nier qu’ils tra­versent en fuyant, elle voit un étrange appa­reil qu’il recon­naît comme une ancienne caméra poin­tée vers le plan­cher. Momen­ta­né­ment à l’abri, ils dis­cutent. Pour évi­ter de répondre à la ques­tion qu’il pressent, John lui montre la lettre de son ancêtre, le texte qui accom­pa­gnait la Sainte Lance. Nalan détecte une autre écri­ture entre les lignes, un texte presque invi­sible écrit, hélas !, comme le pre­mier, en vieil alle­mand.
Au XIIe siècle, Johannes von Har­te­lius a été démis de ses vœux de tem­plier après avoir sauvé la Sainte Lance de sa perte irré­mé­diable dans les flots. En plus de sa mis­sion de gar­dien de la pré­cieuse relique, il reçoit une épouse. Quatre enfants plus tard, elle décède en couches. Invité à Mayence pour le sacre du nou­veau roi, il est chargé par ce der­nier d’escorter sa sœur, la prin­cesse Agnès, jusqu’en Terre sainte où Von Dra­chen­hertz la pren­dra pour épouse. La route est longue et, en che­min, ils deviennent amant et elle tombe enceinte. C’est un crime hor­rible, la tête de Johannes sera mise à prix et il sera tra­qué par­tout. Elle-même n’est pas pro­mise à sort plus enviable.
Nalan pour­suit son idée et quand ils réus­sissent à être hors de dan­ger parmi les Kurdes, elle le ques­tionne. Il doit avouer que les tor­tion­naires de ses parents, les viols de sa mère aux­quels elle devait assis­ter étaient fil­més. Elle n’a plus qu’une idée en tête se ven­ger du res­pon­sable et entraîne John dans une quête fer­tile en dan­gers de toutes natures dans une région où bouillonnent tant de haines…

Mario Rea­ding se reven­dique comme un excellent connais­seur de la vie et de l’œuvre de Nostra­da­mus. Mais il fait éga­le­ment preuve d’une remar­quable éru­di­tion sur les sujets rela­tifs aux Tem­pliers, sur l’origine et les moti­va­tions de la créa­tion de l’Ordre, ses pré­ceptes, ses règles. Il donne une très bonne pré­sen­ta­tion de ces sol­dats du Christ, leurs valeurs et leurs actes.
Dans Le Manus­crit du Temple, il déve­loppe deux his­toires, alter­nant les par­cours, les moments d’une vie, met­tant en lumière les nom­breuses croyances, les diverses façons d’appréhender des situa­tions simi­laires et les rap­ports aux reli­gions avec leurs effets plus ou moins délé­tères. Il fait tenir, à cer­tains de ses per­son­nages, un dis­cours de misé­ri­corde, de com­pas­sion, d’amour et de foi en l’amitié, une ami­tié nouée sur des valeurs fai­sant fi des dik­tats reli­gieux pour lais­ser s’exprimer l’humanité dans ce qu’elle a de plus beau. Il met aussi, en avant l’amour qui naît, se for­ti­fie sans se pré­oc­cu­per des contraintes sociales, des pré­ju­gés de classe, des fron­tières fic­tives et fal­la­cieuses géné­rées par la nais­sance.
Mais le roman­cier n’hésite pas à mal­me­ner ses per­son­nages, ne leur épar­gnant rien, les met­tant en dan­ger pour, cepen­dant, les sau­ver au der­nier moment. Tou­te­fois, l’ on meurt beau­coup dans ses romans.

Une troi­sième aven­ture de John Hart, The Tem­plar Suc­ces­sion est parue au Royaume-Uni en avril 2016. Ce second volet des aven­tures des deux héros est pas­sion­nant, attrac­tif, voire addic­tif, tant par l’aura des per­son­nages, par l’apport d’informations, que par les mul­tiples péripéties.

serge per­raud

Mario Rea­ding, Le Manus­crit du Temple (The Tem­plar Inhe­ri­tance), tra­duit de l’anglais par Flo­rence Man­tran, Le cherche midi, coll. “Thril­lers”, juin 2016, 336 p. – 18,50 €.

 

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