Franck Thilliez, Rêver

Vos rêves peuvent deve­nir vos pires cauchemars

Les romans de Franck Thil­liez sont tou­jours atten­dus avec impa­tience. Passé maître dans l’art du thril­ler, Franck Thil­liez s’est imposé comme un auteur fran­çais incon­tour­nable du genre. Après avoir (re)mis en scène son duo pré­féré Hen­ne­belle et Sharko dans le brillant Pan­dé­mia, il nous pro­pose ici un one-shot qui mélange habi­le­ment rêve et réa­lité. Rêver nous entraîne en effet dans un voyage tem­po­rel, au rythme des crises de nar­co­lep­sie de l’héroïne Abi­gaël, psy­cho­logue aguer­rie aux plus sombres affaires criminelles.

A tout moment, Abi­gaël peut som­brer dans un som­meil pro­fond. Cette patho­lo­gie peut se révé­ler des plus han­di­ca­pantes dans sa vie quo­ti­dienne. C’est pour­tant avec pas­sion et une volonté sans faille qu’elle se lance sur les traces d’un kid­nap­peur d’enfants qui sévit depuis plu­sieurs mois sur tout le ter­ri­toire fran­çais. Aucun indice, aucun lien entre les quatre enfants qu’il retient pri­son­nier sans don­ner de nou­velles aux familles.
Quelle est la moti­va­tion de celui que tout le monde a sur­nommé Freddy ? Les ques­tions se bous­culent dans la tête d’Abigaël, qui a perdu récem­ment sa fille Léa et son père dans un acci­dent de voi­ture, dont elle a réchappé, sans gar­der aucun réel sou­ve­nir. Com­ment a-t-elle sur­vécu ? Quel secret cachait son père ?
Abi­gaël doit constam­ment lut­ter pour démê­ler ses cau­che­mars à répé­ti­tion de la réa­lité, quitte à faire émer­ger une vérité des plus dérangeantes.

Comme à son habi­tude, Franck Thil­liez s’est effi­ca­ce­ment docu­menté sur la nar­co­lep­sie, et rend donc le quo­ti­dien de son héroïne cré­dible et tou­chant. Il maî­trise éga­le­ment les rouages des enquêtes judi­ciaires, et des recherches menées par les dif­fé­rentes polices, qu’elles soient judi­ciaire ou scien­ti­fique. Il rend donc acces­sible à tout le monde chaque nou­vel uni­vers dans lequel il plonge le lec­teur, sans tou­te­fois tom­ber dans la faci­lité, comme le prouve la nar­ra­tion qu’il a choi­sie ici de mettre en place.
En effet, le lec­teur est invité à suivre deux lignes tem­po­relles tout au long de l’histoire, la plus proche se situant le 25 juin 2015, la seconde coïn­ci­dant avec les faits qui se sont pro­duits avant l’accident fatal du 06 décembre 2014. Le lec­teur est donc amené à mieux com­prendre la confu­sion men­tale qui s’empare d’Abigaël à chaque crise, et doit lui aussi faire plus ou moins le tri des infor­ma­tions four­nies tout au long de l’enquête, pour réta­blir la vérité.

Une vérité qui ne sera vrai­ment déce­lable que dans les der­nières pages (à un ou deux détails près cepen­dant..). L’auteur joue avec nos nerfs jusqu’à la fin avec habi­leté, ren­dant trouble la fron­tière entre rêve et réa­lité, un peu comme dans le film Incep­tion. Il engage aussi le lec­teur à par­ti­ci­per acti­ve­ment à la lec­ture ou relec­ture du roman, en fai­sant dis­pa­raître un cha­pitre, qu’il ne pourra décou­vrir ensuite sur le net qu’en ayant trouvé un code donné par un des per­son­nages du roman.
Le cha­pitre man­quant per­met d’éclairer une par­tie de l’histoire, mais n’empêche en rien sa com­pré­hen­sion, voilà donc une très bonne idée qui nous incite à reprendre une der­nière fois le voyage oni­rique aux côtés d’Abigaël, en n’oubliant pas que, comme le dit Georges Duby, “la trace d’un rêve n’est pas moins réelle que celle d’un pas”.  Aucun doute que les rêves d’Abigaël lais­se­ront beau­coup de traces sur votre chemin !

franck bous­sard

Franck Thil­liez, Rêver, Fleuve  noir, 2016, –598 p. — 21,90 €.

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Filed under Pôle noir / Thriller

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