Leo, Antarès, Episode 6

La fin d’un cycle… pour mieux rebondir !

Kim Kel­ler est l’héroïne emblé­ma­tique de la série Les Mondes d’Aldébaran, une suite de seize tomes, com­men­cée il y a vingt ans par Leo (soit Luis Eduardo de Oli­veira). Après le cycle d’Aldé­ba­ran, où elle était une ado­les­cente vivant des aven­tures mus­clées, après Bétel­geuse où elle ren­contre la Man­tisse et Sven, un extra­ter­restre qui lui donne une fille, Lynn, elle subit un chan­tage pour par­tir en mis­sion sur Anta­rès en vue de pré­pa­rer une colo­ni­sa­tion. Sa fille dis­pa­raît bru­ta­le­ment après la sur­ve­nue d’une mys­té­rieuse sphère.
À la fin du tome 5, une navette, simi­laire à celle du petit groupe d’exploration, se maté­ria­lise tout près. Un nou­veau conflit éclate, alors, entre le chef du pro­jet Anta­rès et Kim pour savoir qui monte dans cette navette. Jede­diah ne sup­por­te­rait pas qu’une femme puisse être la pre­mière à ren­con­trer des extra­ter­restres. Elle prend le des­sus phy­si­que­ment et l’enferme dans la soute, puis, en com­pa­gnie d’Alexia, entre dans ce nou­veau vais­seau qui dis­pa­raît ins­tan­ta­né­ment aux yeux de ceux res­tés sur le sol. Elles abordent un pay­sage inconnu et voient arri­ver Lynn en com­pa­gnie de la sœur dis­pa­rue, elle aussi, d’un membre de la mis­sion. Mais, rien n’est simple dans la vie de Kim, alors…

Leo construit, au fil des années, sous cou­vert d’une science-fiction par­ti­cu­lière, une fresque huma­niste autour d’une magni­fique héroïne. Avec Kim, il a sou­haité (et réussi !) don­ner une véri­table place à la femme, pour rompre avec cette tra­di­tion de récits où elle ne joue qu’un rôle secon­daire, se conten­tant de suivre, quand ce n’est pas de gêner, l’homme dans la pro­gres­sion de l’aventure. Mais, il ne tombe pas dans le piège qui inver­se­rait tota­le­ment les rap­ports et qui ferait de l’homme un second cou­teau met­tant des pas incer­tains, effrayés, dans ceux de l’héroïne.
Le scé­na­riste déplace ses intrigues dans les étoiles en trans­por­tant, cepen­dant, la nature humaine, ses tares et ses ful­gu­rances, repro­dui­sant alors, à des années-lumière, toutes les émo­tions, tous les sen­ti­ments — les plus beaux comme les plus laids. Outre la place de la femme, Leo fait part, au fil de ses albums et de la pro­gres­sion de son récit, de ses réflexions, de ses inquié­tudes sur les évo­lu­tions scien­ti­fiques, sur les bou­le­ver­se­ments environnementaux…

Kim se heurte régu­liè­re­ment à des êtres bor­nés, mais le sum­mum est atteint avec Jede­diah, le chef du pro­jet Anta­rès, un dévot de la pire espèce, per­suadé d’être élu par Dieu pour être le pre­mier à entrer en contact avec des extra­ter­restres. Le contact se fait néan­moins, et l’auteur place ses réflexions quant à la per­cep­tion qu’ont les visi­teurs : “Mon peuple a consi­déré qu’une société qui pos­sède en son sein un nombre impor­tant de gens qui pensent comme vous est une société encore arrié­rée. Et c’est une société poten­tiel­le­ment dan­ge­reuse. Des gens comme vous sont une source absurde de mal­heurs et de souf­frances inutiles… ” Il crée autour de ses per­son­nages un bes­tiaire fabu­leux, une flore extra­va­gante dans des décors somp­tueux.
Avec ce sixième tome d’Anta­rès, Leo boucle une magni­fique his­toire, levant toutes les inter­ro­ga­tions, mais ouvrant, à nou­veau, toute une série de ques­tions quant à la suite des aven­tures stel­laires de Kim. Les Mondes d’Aldébaran sont deve­nus, à juste titre, une réfé­rence en matière de bande dessinée.

serge per­raud

Leo (scé­na­rio, des­sin, cou­leur), Anta­rès, Épi­sode 6, Dar­gaud, août 2015, 56 p. – 11,99 €.

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