Dufaux, Delaby & Jérémy, Complainte des Landes perdues — Les Chevaliers du Pardon: t.4 “Sill Valt”

Un final grandiose !

Jean Dufaux ouvre cet album sur une pré­face par­ti­cu­liè­re­ment émou­vante car Phi­lippe Delaby n’a pas fini de des­si­ner l’histoire. La mort l’a fau­ché bru­ta­le­ment alors qu’il ter­mi­nait la planche 37, en jan­vier 2014. C’est un immense des­si­na­teur, un illus­tra­teur de talent qui a dis­paru lais­sant une œuvre magis­trale inache­vée. Le scé­na­riste raconte la sym­biose qui les unis­sait, ce goût pour l’excellence et la volonté de don­ner au lec­teur le meilleur d’eux-mêmes.

Dans un vil­lage perdu, Le Gui­nea Lord retrouve Saa­varda, la Mère obs­cure qui règne sur les Mori­ganes. Il lui apporte la tête de la fée Sanc­tus, celle qui a quitté le clan des sor­cières. Or, le test du feu prouve que ce n’est pas elle. Alors que le Gui­nea Lord repart pour­suivre sa traque, Saa­varda donne l’ordre à sa ser­vante de le tuer. Pro­tégé par l’armure, il réus­sit à se débar­ras­ser du démon mais ne peut évi­ter une grave bles­sure. Il se réfu­gie chez sa mère, dans le Norhur­land, pour se soi­gner. Pour le com­battre, Sill Valt veut com­prendre l’origine du Gui­nea Lord, les mys­tères qui ont pré­sidé à sa nais­sance. Il se rend au châ­teau de la dame à l’Hermine. De son côté, Sea­mus livre com­bat pour pro­té­ger la fée réfu­giée dans le corps d’un enfant. Mais il sent que la guerre entre les Mori­ganes et les Che­va­liers du par­don n’aura pas de fin tant que la fée vivra. Il faut donc abso­lu­ment en finir d’une manière ou d’une autre.
Sill Valt, dans le châ­teau de la belle dame ren­contre la fille estro­piée de celle-ci. Elle le met en garde, décrit la lutte ter­rible qu’il devra mener contre sa mère. Or, ce com­bat débute par des joutes amou­reuses qui laissent le che­va­lier épuisé à l’aube. Il a ordre de ne pas regar­der quand la dame s’en va. Mais, un matin, il ouvre les yeux…

Cet album signe la conclu­sion du cycle des che­va­liers du Par­don, le second volet de Com­plainte des landes per­dues. Le maître en a fini avec l’élève. Ce der­nier est devenu un che­va­lier et tous deux luttent contre les forces du mal. Le pre­mier s’est donné pour mis­sion d’en finir avec le démon qui pour­chasse une ex-morigane tou­chée par la grâce et le second se charge de pro­té­ger celle-ci dans toutes les enve­loppes où elle peut se réfu­gier. Jean Dufaux excelle à main­te­nir une ten­sion tout au long de ses récits avec les per­son­nages excep­tion­nels qu’il sait si bien créer et ani­mer. Il boucle ce cycle de façon habile, bluf­fant les lec­teurs et répond à nombre de ques­tions sou­le­vées depuis le début de l’histoire. Par une superbe pirouette, nar­ra­tive, il fait un lien inat­tendu.
Phi­lippe Delaby, dans cette série, n’était pas tenu de res­pec­ter une réa­lité his­to­rique. Il avait toute liberté, et il ne s’en pri­vait pas, pour créer des “gueules” extra­or­di­naires, réa­li­ser des mises en scène, des mises en page d’une grande beauté.
La suite de l’album a été assu­rée par Jérémy qui a lon­gue­ment tra­vaillé avec Phi­lippe Delaby jusqu’à ce qu’il assure le gra­phisme de Bar­ra­cuda avec Jean Dufaux au scé­na­rio. L’élève s’est hissé au niveau du maître et le pas­sage de relais est presque indé­ce­lable. C’est éga­le­ment la marque d’un homme de qua­lité, de savoir trans­mettre aussi bien pour ame­ner ses élèves à son niveau.
Com­plainte des landes per­dues, cette série d’exception, peut conti­nuer à nous enchan­ter avec un autre acteur, dans un nou­veau cycle. Elle reste une réfé­rence dans l’univers de la bande dessinée.

serge per­raud

Jean Dufaux (scé­na­rio), Phi­lippe Delaby et Jérémy (des­sin), Sébas­tien Gérard et Béren­gère Mar­que­breucq (cou­leurs), Com­plainte des landes per­dues, cycle Les Che­va­liers du Par­don, tome 4 : “Sill Valt”, Dar­gaud, novembre 2014, 56 p. – 13,99 €.

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