Quel enjeu caché pour la guerre de Sécession ?
La construction des États-Unis d’Amérique n’a pas été aussi simple qu’on veut bien le présenter. Outre la Guerre de Sécession, la cohabitation de populations fort différentes ne s’est pas faite dans l’euphorie, ni avec l’amour de son prochain. Steve Berry aborde ce sujet dans son nouveau roman, mettant en scène, de façon brillante, des errements politiques. Dans un prologue, Abraham Lincoln est confronté à l’épouse de John Frémont, le commandant des armées de l’Ouest qui a décrété l’émancipation des esclaves dans les Etats qu’il contrôle, contre la volonté du président. Pour répondre à une demande de Stéphanie Nelle, dont un agent a disparu, Cotton Malone quitte sa librairie de Copenhague pour aller chercher un témoin en Suède. En revenant par la mer, ils sont pris en chasse par deux hommes qui les mitraillent. C’est l’intervention osée du jeune Luc Daniels, un agent de la Division Magellan, qui leur sauve la mise. Dans le sud de l’Utah, le sénateur Rowan, un Mormon au sommet de hiérarchie religieuse découvre les restes de pionniers partis, au milieu du XIXe siècle, cacher le trésor des religieux. Mais l’or a disparu. Josepe Salazar, un mormon torture l’agent enlevé pour connaitre les raisons qui poussent le ministère de la Justice à s’intéresser à lui. Quant à Stéphanie, elle se retrouve sur la sellette car la demande d’informations de la Maison Blanche sur le sénateur Rowan n’est pas passée inaperçue.
Le fanatisme religieux, et c’est une litote, ne date pas d’aujourd’hui. Le gouvernement de ce qui deviendra la plus puissante fédération d’Etats du monde doit compter avec lui dès le début. Les Saint du dernier jour, plus connus sous le vocable de mormons, étaient par leur mode de vie, sans cesse persécutés. C’est en fuyant vers l’Ouest qu’ils ont créé un Etat gigantesque qu’ils voulaient totalement indépendant. Le prophète Brigham Young ne tenait pas compte des lois fédérales. Sa communauté imprimait sa propre monnaie, pratiquait la polygamie, avait ses tribunaux… Abraham Lincoln, confronté à la guerre civile et à une série de défaites de l’armée de nordistes, veut s’assurer du soutien de cette puissance religieuse. C’est autour de cette situation, des tractations diplomatiques entre le président et les Mormons que s’articule la présente intrigue. Le romancier repend son héros fétiche, Cotton Malone, implique fortement Stéphanie Nelle. On découvre Cassiopée Vitt, la femme qui partage épisodiquement la vie de Cotton, dans une position inattendue et ambiguë.
Pour bousculer ses héros, Steve Berry conçoit une intrigue solide où il mêle, avec des réminiscences du passé, l’usage de lourds secrets pour une déstabilisation du pouvoir actuel. Il utilise, avec brio, des éléments constitutifs de la Constitution des USA, des extraits des livres saints des Mormons. Il décrit l’histoire de cette religion, des principaux fondateurs, de leurs “évangiles”, l’organisation de la hiérarchie et toujours ce goût pour le pouvoir qui mène tant d’hommes. Il cite les raisons farfelues avancées par les Saints du dernier jour pour justifier les crimes et assassinats commis au nom de leur foi. Ces raisons sont aussi tordues que celles avancées actuellement dans d’autres lieux.
Avec L’Héritage occulte, Steve Berry ouvre un nouveau volet de secrets historiques passionnants.
serge perraud
Steve Berry, L’Héritage occulte (The Lincoln Myth), traduit de l’anglais (États-Unis) par Danièle Mazingarbe, cherche midi, coll. “Thriller”, novembre 2014, 544 p. – 22,00 €.