Avec ce nouveau livre, le romancier installe son récit avec nombre de problématiques de société bien d’actualité. Ainsi, il confronte ses personnages à la montée des extrêmes, à ces groupes identitaires qui se multiplient partout en Europe. Cette ultra-droite est selon Europol la deuxième plus grande menace terroriste sur le vieux continent. L’auteur aborde avec une réalité crue les mécanismes d’endoctrinement et de violence collective. Il détaille les situations de ces migrants, ces femmes et ces hommes montrés comme une menace par l’extrême droite.
Au départ, Olivier Bal propose deux affaires, la traque d’un tueur en série et une enquête sur un mort affreusement mutilé. Il met en place une policière de l’antiterrorisme et un flic de la PJ, tous deux en souffrance, deux êtres torturés, fragiles, qui se surinvestissent dans leur travail pour ne pas penser au passé.
Il installe une large partie de son histoire dans un mystérieux château près de Lille, un vaste domaine dont les propriétaires successifs sont obsédés par La Divine comédie de Dante et ses neufs cercles infernaux.
Hassan Mansour, un migrant syrien, est enlevé à Paris le 3 février et doit faire face à la mort. Il laisse Darya, son épouse, seule.
Sylvia Chassagne décide, ce 7 février, en rentrant passablement éméchée, de parler, de lui dire combien il l’écœure, devenu député. Ce qu’elle trouve dans leur luxueuse propriété est un monticule de terre où sont déposés des objets bien connus. Elle comprend que l’Ange noir a encore frappé.
Sofia Giordano, flic à la SDAT, une sous-direction de l’antiterrorisme, arrive sur les lieux. Elle ne pensait pas qu’il frapperait si tôt, le dernier meurtre remonte à moins de trois semaines. Son équipe suspecte une piste terroriste islamiste compte tenu des objets placés par l’assassin sur les lieux. Pour la quatrième fois, le meurtrier s’en prend à des notables, dans des contrées différentes, comme s’il voulait répandre la terreur dans tout le pays.
À Angers, Louis Farge, un colosse, se retrouve obligé de se battre, tombé dans un piège. Mais sortant de prison, il doit fuir. C’est ainsi qu’il réussit à semer ses poursuivants et découvre sur une place une démonstration de béhourd. Il est séduit. Sa corpulence le fait remarquer par l’entraîneur d’une équipe. Il va sceller son destin.
Gabriel Geller, de la 2e DPJ, une bonne cinquantaine, vit très mal depuis deux ans, depuis la perte de sa fille Léa. Il enquête sur le meurtre d’Hassan et, dans une suite de traques, va être confronté à la Meute, un mouvement d’ultra droite identitaire basé à Lille.
Sans le savoir, ces deux policiers vont devoir aller au bout d’eux-mêmes car…
Fort d’une documentation solide, diverse et variée, l’auteur multiplie les informations de toutes natures comme le joyeux bazar de la lutte antiterroriste avec une dizaine de services impliqués. Il met en avant le béhourd, ce sport de lutte, inspiré des combats médiévaux, qui se pratique à coups d’épées, de boucliers en portant une armure de chevalier.
Il fait évoluer son lecteur dans un univers où la fiction prend le pas sur la réalité, débouchant sur la haine, la violence. La Meute, à l’image de celle des loups, illustre des individus endoctrinés, manipulés. Le décor s’approprie Satan et Lucifer comme maîtres. Bal compose ses personnages de manière minutieuse, les dotant d’une psychologie parfaitement adaptée aux circonstances et aux situations dans lesquelles il les place.
Son récit se déroule sans temps morts, dans de multiples décors à chaque fois très détaillés. C’est ainsi que le romancier fait visiter une partie de Toulon, d’Angers, de Lille, des Vosges, de la Pologne, la Hongrie…
Une fois encore, le romancier offre un thriller machiavélique, à l’atmosphère sombre, avec des scènes assez difficiles à vivre (même en tant que lecteur, alors c’est vous dire pour les protagonistes…) nourri par un suspense oppressant jusqu’à un final dantesque mais qui laisse penser à une suite possible.
serge perraud
Olivier Bal, La Meute, XO Éditions, coll. “Thrillers”, avril 2024, 480 p. — 21,90 €.