Perrine Le Querrec, Les mains d’Hannah

Hannah Höch et sa lutte contre les ségrégations

Perrine Le Quer­rec est une per­fec­tion­niste. Son livre sur l’artiste dadaïste Hanna Höch (1889 — 1978) le prouve en rap­pe­lant au pas­sage com­bien ce mou­ve­ment d’avant-garde ne lais­sait pas for­cé­ment une place de choix aux créa­trices femmes. Si bien qu’elle fut une excep­tion.
Pour mieux en par­ler, l’essayiste est entrée en le “je” de l’exilée, elle parle au besoin sa langue pour mieux faire com­prendre com­ment l’auteure et artiste a pro­vo­qué, dépecé, importé-exporté l’art et une langue qui se sont inven­tés dans sa bouche et dans ses mains.

Cette manière de dia­lo­guer avec Han­nah Höch donne à ce livre une forme et une force par­ti­cu­lières qui épousent cette lit­té­ra­ture et art de com­bat contre le machisme afin d’élever jusqu’à inven­ter son “ébauche pour le monu­ment d’une che­mise à den­telles impor­tantes” à la gloire des femmes incon­nues.
Encou­ra­gée par ses amis Kurt Schwit­ters et Sophie Tauber-Arp, elle a créé une oeuvre lit­té­raire et plas­tique aux images emmê­lées er dis­lo­quées. Ses pho­to­mon­tages et col­lages furent voués aux per­sé­cu­tions des S.S.. Mais pour les sau­ver, l’ “artiste dégé­né­rée” eut le temps de les enter­rer dans son jar­din et ce, juste après que ses “ciseaux de sor­cière” eurent pour­fendu et ouvert “le ventre à bière de la Répu­blique de Wei­mar” qui fit le lit du nazisme..

Pour la saluer, Per­rine Le Quer­rec a su façon­ner une écri­ture expé­ri­men­tale en jouant de divers pro­ces­sus (répé­tions, signes, réité­ra­tions, etc.) Et elle le pré­cise elle-même : “À la pour­suite de Han­nah Höch j’échafaude des écri­tures, les fon­da­tions d’un livre incer­tain.” Cela, parce que par­ler d’Hannah Höch oblige à trou­ver une tech­nique qui impose,  à l’image de la sienne,  de “trans­for­mer le plein en vide, l’obscurité en clarté”.
L’essayiste et poé­tesse rap­pelle le carac­tère de fon­da­tion de l’écriture d’Hannah Höch qu’elle défi­nit comme “tro­glo­dyte. Chto­nienne. Minière. Minérale.”

Tout dans son livre est là pour en épou­ser les mou­ve­ments complexes.

jean-paul gavard-perret

Per­rine Le Quer­rec, Les mains d’Hannah, Tin­bad, Paris, 2023, 82 p. — 19,00 €.

1 Comment

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One Response to Perrine Le Querrec, Les mains d’Hannah

  1. Villeneuve

    Per­rine Le Quer­rec ” rap­pelle le carac­tère de fon­da­tion de l’écriture d’Hannah Höch qu’elle défi­nit comme “tro­glo­dyte. Chto­nienne. Minière. Miné­rale.”
    la conclu­sion de JPGP est magis­trale : ” Tout dans son livre est là pour en épou­ser les mou­ve­ments complexes. ”

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