Michel Dunand, Rien de plus

Regar­der pas­ser les nuages

Rien de plus, en dépit de son éco­no­mie ver­bale, appelle à son hori­zon un “mais encore”. Michel Dunand, en sa suite de vignettes, réclame impli­ci­te­ment des len­de­mains.
Et pas for­cé­ment ceux qui déchantent et appellent au sanglot.

A sa manière et dans sa dis­cré­tion, le poète reste coriace même si le temps est aux doutes. Reste une fixa­tion de l’un dans le tout déployé comme un essaim.
Plu­tôt que voir rétré­cir les pay­sages, Dunand file encore même si son passé ne l’oublie pas. Mais reste tou­jours dans son évo­ca­tion un exer­cice de pudeur.

Sa jeu­nesse fût-elle ennuyeuse ? Sans doute. Parce qu’à cet âge la myo­pie est de mise. Mais, plus tard, vogue le navire humain en des voyages qui mêlent le Japon à Paris, Max Jacob à Des­nos, Mel­ville et ses baleines au port de Publier au bord du Léman où passe encore l’ombre d’Anna de Noailles sous son chapeau-turban.

Et c’est une manière de révi­ser de qui fut, de vivre deux vies et deux pays en un. Et c’est ainsi que ce livre avance : “Mon pays n’est pas mon pays, J’habite ici. Je vis ailleurs, ban­lieue du verbe, au coeur de la nuit qui miroite et cli­gnote”.
Mais où tout ose encore une lumière mal­gré Drancy et l’épreuve du père — avec le temps, il se rap­proche encore plus du poète.

Restent aussi des pay­sages anné­ciens. Un Annecy des cours, de l’Avenue de Cham­béry et loin des chro­mos d’usage. Preuve que celui qui se dit super­fi­ciel reste le poète des pro­fon­deurs même en culti­vant une légè­reté par­ti­cu­lière. L’enfance n’a pas voûté Dunand, son “je” conti­nue à se dénouer là où un nous de facto entre en jeu car une telle poé­sie est un miroir.

Et si “L’homme est cir­cu­laire”, l’auteur au sein même du lieu qui est le sien conti­nue à prendre racine “au sein du vent”.
C’est une façon de regar­der pas­ser les nuages qui ne doivent rien aux jeteurs de sort ou aux chantres d’absolu.

L’auteur pré­fère renouer avec ceux qui manquent à l’appel pour qu’au réveil il soit encore midi.

jean-paul gavard-perret

Michel Dunand, Rien de plus, Edi­tions Livres du Monde, Annecy, 2022, 96 p. –15,50 €.

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Filed under Chapeau bas, Poésie

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