Celui qui n’a jamais osé écrire à la fille en rouge — entretien avec Alain Marc (Polaroïds)

Est-ce l’influence des écrits de Bataille qu’il relit sans cesse ?, mais Alain Marc fait éprou­ver dans sa vision de monde et sa pra­tique de l’écriture un moyen de créer des images sou­dain “audibles”. Il les sort de leur apha­sie. Si bien que ses mots prouvent que l’homme ne vit pas seule­ment de conte­nus d’informations ni même de véri­tés, mais d’abord de rela­tions entre ce qui se voit et com­ment ça se dit.
Pour preuve ses Pola­roïds : avant d’être images, ils sont dit l’auteur “d’abord un concept”. En une écri­ture minu­tieuse et dont l’effet au sein même de l’acte sexuel efface tout effet cli­ché ou por­no­gra­phique, gros plans comme  pano­ra­miques jouent à plein. Dans cette forme “dia­lo­guée” avec les oeuvres éro­tiques de Jean-Marc André, l’écriture devient en sub­stance la mise en scène et le mys­tère d’une parole à double entente qui se donne la réplique à elle-même.

Elle com­mé­more sans cesse le retour de ce qui dis­pa­raît et qui revient de la dis­pa­ri­tion même. La parole com­mu­ni­cante est liée au pro­blème de sa transgression.µ
Il ne s’agit plus de rele­ver un drap sur les yeux mais de devi­ner des corps et guet­ter leur moindre tressaillement.

Entre­tien :

Qu’est-ce qui vous fait lever le matin ?
De savoir ce que je vais encore pou­voir bien faire dans cette jour­née pour avan­cer encore un peu plus.

Que sont deve­nus vos rêves d’enfant ?
Réussis !

A quoi avez-vous renoncé ?
A gagner beau­coup d’argent !

D’où venez-vous ?
Je crois du ventre de ma mère mais rien ne me le prouve en fait…

Qu’avez-vous reçu en “héri­tage” ?
Un cer­tain goût d’opiniâtreté !

Un petit plai­sir — quo­ti­dien ou non ?
Man­ger un bon gâteau avec une coupe de cham­pagne bien fraîche !

Qu’est-ce qui vous dis­tingue des autres écri­vains ?
La sin­cé­rité et l’engagement, mais je ne suis pas le seul…

Quelle est la pre­mière image qui vous inter­pella ?
Com­ment se sou­ve­nir de la toute pre­mière image ? Sûre­ment celle de sa propre mère se pen­chant sur son bébé… Je retien­drais pour­tant celle-ci : le pay­sage enneigé de Noël entiè­re­ment des­siné à la craie sur le tableau de la classe par mon ins­ti­tu­teur pré­féré avant de par­tir en vacances de Noël, pho­to­gra­phié chaque année et parais­sant dans le jour­nal local.

Et votre pre­mière lec­ture ?
Le Clan des sept et le Club des cinq !

Quelles musiques écoutez-vous ?
Je n’en écoute qua­si­ment plus à part France Musique quand je me rase ou épluche mes pommes en automne… Mais j’ai beau­coup écouté rock pro­gres­sif, musique clas­sique et contem­po­raine, jazz, chan­son rock ou non fran­çaise, etc.

Quel est le livre que vous aimez relire ?
L’œuvre com­plète de Georges Bataille.

Quel film vous fait pleu­rer ?
Aucun, puisque la nar­ra­tion vient tou­jours diluer le moment bref de l’émotion intense. Par contre, il m’arrive de pleu­rer lorsqu’une per­sonne sou­dain réa­lise quelque chose d’extraordinaire devant moi.

Quand vous vous regar­dez dans un miroir qui voyez-vous ?
J’évite tou­jours le miroir ! Par contre, le peu que cela m’arrive, je vois un visage qui vieillit un peu plus chaque jour : j’avais espoir de res­sem­bler un jour au beau visage fripé de Jacques Hige­lin, ou à celui de Samuel Beckett, mais c’est d’un autre dont il s’agit…

A qui n’avez-vous jamais osé écrire ?
A la fille en rouge que je croi­sais chaque matin en mobylette.

Quel(le) ville ou lieu a pour vous valeur de mythe ?
Rouen, ville de mon pre­mier baiser.

Quels sont les artistes et écri­vains dont vous vous sen­tez le plus proche ?
Pour reprendre Pierre Bour­geade : ceux qui mettent leurs couilles sur la table… C’est bien sûr une expres­sion mais il y a de ça.

Qu’aimeriez-vous rece­voir pour votre anni­ver­saire ?
Ce que je n’ai jamais reçu : le choix est vaste !

Que défendez-vous ?
La liberté intérieure.

Que vous ins­pire la phrase de Lacan : “L’Amour c’est don­ner quelque chose qu’on n’a pas à quelqu’un qui n’en veut pas”?
Je n’ai jamais com­pris Lacan : il me le prouve à nouveau !

Que pensez-vous de celle de W. Allen : “La réponse est oui mais quelle était la ques­tion ?“
Sui­ci­daire, tout en étant du pur Allen !

Quelle ques­tion ai-je oublié de vous poser ?
Puisque toute ques­tion pro­vient tou­jours d’une envie de l’autre, il me semble que c’est à vous de me répondre maintenant…

Entre­tien et pré­sen­ta­tion réa­li­sés par jean-paul gavard-perret pour lelitteraire.com, le 5 mars 2022.

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