Stéphane Lambert, Tout est paysage

Un dépas­se­ment qui n’est ni abs­trac­tion ni oubli de la matière

Le livre de Sté­phane Lam­bert est pas­sion­nant car il trans­forme la vision et la notion de pay­sage dans la pein­ture. Et ce, au sein d’un conglo­mé­rat de textes.
Cer­tains sont atten­dus eu égard au sujet : celui consa­cré aux Nym­phéas de Monet par exemple.

Mais d’autres textes (parus en revues, pla­quettes ou cata­logue d’exposition) ramènent à des artistes aux­quels on s’attend moins en un tel registre. Manet, Morandi, Staël sont encore peu éloi­gnés du genre tel qu’il est habi­tuel­le­ment défini.
Mais c’est une autre affaire avec Twom­bly, Klee, Tàpies, Mondrian.

Stéphane Lam­bert s’approche de leur matière pic­tu­rale tout en décri­vant ses déam­bu­la­tions dans divers musées. Car il cherche aussi à décou­vrir des lieux où les artistes créèrent et qui jus­ti­fient en grande par­tie leur approche. Une telle impré­gna­tion des pay­sages intimes des peintres crée un corps-à-corps avec la matière de leurs oeuvres.
Elle est sou­li­gnée dans ce livre non seule­ment de repro­duc­tions mais de pho­to­gra­phies des artistes dans leur ate­lier. De plus, l’auteur pré­cise  tou­jours le type de geste propre à chaque créa­teur et le tra­vail que doit effec­tuer le regar­deur pour atteindre le silence de chaque oeuvre.

Par cette atten­tion, l’essayiste illustre com­ment peuvent naître une pein­ture “de pay­sage” là où elle n’est pas atten­due : les sculp­tures blanches de Twom­bly et l’insignifiance de leur maté­riau et les ques­tions qu’elles sou­lèvent par exemple. Ce der­nier comme Morandi et les autres crée des “signaux (…) agglo­mé­rats de traces” là où tout semble se perdre mais défi­nit “du” pay­sage voire ce qu’il nomme un “après-paysage”, preuve d’un dépas­se­ment, non seule­ment du décor de la nature mais de ce qu’il nomme la “dévas­ta­tion” qui s’empara du XXème siècle artistique.

Existe chez les peintres rete­nus un dépas­se­ment qui n’est ni abs­trac­tion ni oubli de la matière. Celle-ci dévoile en ses restes un monde par des vibra­tions et des cou­leurs éteintes dont Tapiès fut par­fois un maître.

jean-paul gavard-perret

Sté­phane Lam­bert, Tout est pay­sage, L’Atelier Contem­po­rain, Stras­bourg, 2021.

1 Comment

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One Response to Stéphane Lambert, Tout est paysage

  1. Villeneuve

    1912 . Cata­racte et cou­leurs éteintes . Monet encou­ragé par Cle­men­ceau retrouve l’envie de tra­vailler en pleine guerre mon­diale et fait construire pen­dant l’été 1915 un vaste ate­lier conçu spé­cia­le­ment pour accueillir ses grandes toiles. Il ima­gine d’abord les pré­sen­ter dans une salle cir­cu­laire, puis aban­donne l’idée au pro­fit d’une salle ellip­tique. Ce pro­jet l’occupe jusqu’à la fin de sa vie . En novembre 1918, il offre à Cle­men­ceau deux pan­neaux déco­ra­tifs qu’il a signés le 11, jour de l’armistice et de la fin de la Pre­mière Guerre mon­diale. En novembre 1919, Cle­men­ceau lui conseille de se faire opé­rer des yeux . Lumière et Nym­phéas . La Vic­toire est là !

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