“Scribe de service”, comme il se plaît parfois à se décrire, Cédric Demangeot dans Le poudroiement des conclusions se livre à un pot-pourri de ses remarques, réflexions, digressions, pensées et commentaires poétiques en 5 moments.
Il y a là les amours littéraires de l’auteur avec en tête Marina Tsvetaeva et Jacques Dupin — preuve (déjà) que l’auteur à la goût bon. Mais ces amours ne sont pas les seules : Cendrars, Svevo, Pizarnik, Bénézet, Lautréamont, Viarre, Kafka et d’autres font bonnes figures.
Demangeot possède le mérite d’éviter les commentaires au sujet des textes prisés. Il veut juste “les faire siens dans sa propre voix, sa propre manière de vivre, son propre corps.“
Il s’agit alors par cette immixtion d’un rapport néanmoins particulier : faire d’entrer « dans l’intimité de personne”. Ce qui résonne avec le titre d’un de ses précédents livres : “Pour personne”.
Si l’on préfère, cela revient à “lire dans le noir” afin de s’abandonner voire de disparaître dans la lecture qui devient l’expérience la plus particulière qui soit et qui, pour l’auteur, a partie liée avec l’écriture. Le créateur cherche toujours à énoncer dans sa langue “ce qui nous est étranger” en ce qui tient d’une lutte pour atteindre ce qui n’a pas encore de noms ou de mots dans une “expérience d’exil et d’enfermement”.
Le tout pour arriver à ce qu’Artaud espérait : à savoir vivre son existence et la sauver.
Il s’agit de supporter le chaos sans prétendre à lui donner sens ou continuité en distribuant des éléments qui permettent d’atteindre des arpents de savoir. C’est pourquoi, en témoignant de tout, le poème tente de dominer la destruction de masse comme l’anéantissement de l’esprit en un monde où les hommes sont « prêts à pisser du pétrole ».
La poésie possède donc un caractère chirurgical ou n’est pas. Par sa “neige”, et quel que soit le temps, l’auteur avance, marche dans un sentiment de déroute mais aussi de conquête selon l’exigence acharnée qui marque son écriture même.
jean-paul gavard-perret
Cédric Demangeot, Le poudroiement des conclusions, Dessins d’Ena Lindenbaur, L’Atelier contemporain, Strasbourg, 2020, 162 p. — 20,00 €.