L’amour dans la faille du temps, dans sa brèche. Faire barrage, dit Cloé Bourguignon — du moins par ses dessins. Qui passe de l’eau dormante à l’eau bouillonnante. Et vice-versa. Preuve que l’amour qui se quitte ne se quitte pas.
C’est une maladie, une addiction, un alcoolisme. Un tabac. Même s’il ne sauve pas. Aimer ne sauve rien. Mais ce n’est pas le problème.
Néanmoins, Cloé Bourguigon met des images dessus. Car, de l’amour, il n’est pas besoin de parler. Les images suffisent à “dire” l’espoir et le désenchantement. La radicalité comme la relativité. Non sans humour voire avec un certain détachement. Mais pas un détachement certain là où les dessins dont la parole, limite de l’amour, rappellent un “ça traverse” sans le moindre pathos et avec la suggestions par le noir et le blanc.
C’est là, l’endroit de l’amour. L’espace du coffret. Sa grammaire élémentaire. La vie matérielle du vertige. Et de la conquête et de la déception. Les chercher d’un carnet à l’autre. Il n’en n’existe pas d’autres en dehors de l’amour. Ils évoquent ses tours, ses détours, ses étreintes, ses mots qui se veulent doux.
Ils sont faits pour croire que l’amour n’est pas parti. Du moins pas trop loin. Pas en totalité. Il ne veut pas s’effacer des ouvrages de Cloé Bourguignon . Le plaisir est dedans dans l’état de désir de l’autre. Tout y baigne. “C’est là que j’ai vécu”, écrivait Eleonora Carrington.
Aimer n’est pas jouir comme souffler n’est pas jouer. Ne pas s’étendre sur le sable de l’amertume où les amants deviennent nostalgiques de ce qui fut. Ils n’ont pourtant pas toujours été si vieux. Et sournois l’un envers l’autre.
Certes, après, il arrive que l’amertume soit une amie proche. Avec des réponses de cire. Comme dans certains inserts qui soulignent ce qui se passe. Ou pas. Ou plus.
Il y a aussi des réponses militantes. Et des métaphores de circonstance. Des zones d’ombre.
Mais aussi des zones claires et des fontaines de jouvence dans un minimalisme qui évide tout ce qui n’est pas — ou plus — important.
jean-paul gavard-perret
Cloé Bourguigon, Boîte 5 carnets, Maison Dagoit, Rouen, 2019 — 18,00 €.
(Preuve que l’amour qui se quitte ne se quitte pas.
C’est une maladie, une addiction, un alcoolisme. Un tabac. Même s’il ne sauve pas. Aimer ne sauve rien. )
Lorsque l’amour se révèle, plus rien ne compte . C’est la consécration suprême, l’essence de la vie !
L’amour se tient là. La biche rentre des bois. “Aimer ne sauve rien” mais anime.