Bégaudeau, lorsqu’il écrit comme lorsqu’il parle, est de ceux qui ont toujours raison parce qu’ils sont infaillibles ou qui sont infaillibles parce qu’ils ont toujours raison. C’est l’anti Bernanos et le plaisantin du cirque germanopratin.
La prétention sue en un tel livre. L’auteur regrette de ne pas être de ces écrivains nés pauvres qui peuvent porter en reliquaire — comme Céline ou Amoz Oz — les appartements misérables de leurs parents. Sa pensée est aussi humiliante pour ceux qui n’appartiennent pas à sa caste que pour ceux qui nourrissent des ambitions académiques bourgeoises.
Il y a d’ailleurs chez l’auteur de l’Habit Vert en puissance. Il soigne pour l’heure une “mauvaise” conduite en faisant partie de ceux qui se distinguent de leurs semblables en trinquant avec les marchands de vins (tout en s’en estimant in petto le devin condescendant).
Incapable de renier les valeurs de la culture bourgeoise, il ne fait qu’entériner la bêtise qu’il voit régner chez ses voisins en défendant les privilèges de sa propre faconde intellectuelle. Sa furieuse bataille autour des principes bourgeois n’est donc qu’une sinistre plaisanterie scolastique.
L’auteur se veut père dans le trou du psychisme de ceux dont il espère programmer l’intelligence. L’infirmier des indigences y prend place au non de la distinction de la sienne. Ses certitudes font de lui un homme d’affaires des doxa intellectuelles.
Bégaudeau ne se refuse pas les ors et stucs hausmanniens mais il suffit de son bel esprit pour s’en éloigner.
Aimer une belle formule de Foucault ou Bakounine donne à l’auteur un pucelage social. Il le libère de sa classe. Le tout dans un mépris sournois, démagogue et toutes griffes dehors envers ceux qui ne pensent pas comme lui, donc qui ne pensent pas. Ou si peu.
jean-paul gavard-perret
François Bégaudeau, Histoire de ta bêtise, Pauvert Editions, 2019.
Très content de lire cet article. Je l’ai écouté sur France culture, on avait l’impression d’un petit stalinien arrogant. Il appelle à “l’autocritique” des bourgeois, on sait comment ce genre d”appel finit.
Bien cordialement
C’est très exactement l’impression que j’ai eue! Ce Begaudeau m’est apparu très content de lui-même, plein de fatuité, de dilettantisme et de superficialité. Il parle comme jadis les petits fonctionnaires du Kremlin. Finalement il exhale de ce personnage un puissant parfum de sottise.
Ce texte sue le verbiage, bourré de préciosité pour se donner quelque hauteur tant il puise dans les bassesses en guise d’argument critique.
Je suis sous le “charme” de ce Bégaudeau que j’ai découvert récemment. Voilà un auteur qui a des idées, qui sait les défendre en étant convaincant et didactique. Parfois il va (un peu) trop loin mais il a raison: la bourgeoisie confisque la démocratie et j’ajoute, ce depuis Napoléon 1er.
Bien sur il manque parfois de nuances mais dans un univers où tout le monde
dit la même chose une voix discordante est nécessaire.
Si son but n’est pas d’instaurer un régime avec les Insoumis alors tout est bien!
En tous cas il aura réussi à vous faire abandonner une approche critique construite et argumentée pour vous faire adopter une réaction épidermique et quelque peu haineuse. J’imagine que qui se sent morveux se mouche.
Quel dommage de gâcher un certain talent littéraire dans une critique purement épidermique.
J’ai vu François Bégaudeau dans “C a vous” ( https://www.youtube.com/watch?time_continue=51&v=EduR-tk_5EM ) et il m’a paru posé, construit dans son analyse de la violence sociale, clair dans son discours à tel point que les 3 détracteurs sur le plateau en étaient estomaqués. Mais peut-être que vous vous êtes reconnu dans les questions préliminaires du livre “Tu votes toujours au second tour des élections quand l’extrême droite y est qualifiée, pour lui faire barrage. Par conséquent, l’abstention te paraît à la fois indigne et incompréhensible. etc.”. Un conseil, évitez le sage Michel Onfray ; il risque de froisser votre confort “bourgeois”
Les réactions et commentaires de certains me font sourire. Ils ne font qu’illustrer parfaitement la « bêtise », thème central de cet essai magistral signé Bégaudeau, et qui est à mes yeux un PUR RÉGAL. Une invitation à l’éveil des consciences. À lire, absolument, et à partager sans modération !!!
Je réagis exactement comme Fred : la critique ci-dessus du bouquin de Bégaudeau est une belle illustration de la “bêtise” ambiante que dénonce justement Bégaudeau.
Écoutez-le directement là : https://www.youtube.com/watch?time_continue=51&v=EduR-tk_5EM.
Vous pourrez vous faire votre propre opinion sans passer par la case “bourgeoisie outrée”
Les propos tenus par cet individu me font penser à ces internautes qui vous répondent des phrases du type “ouais toi t’as voté Macron, etc.” quand tu oses faire part de quelques interrogations au sujet des Gilets Jaunes. Si tu réprouves les menaces et insultes au sein même du mouvement, les agressions des journalistes, etc. , tu es forcément un adepte de Macron et un horrible bourgeois dont le frigo est plein à craquer. (J’ai toujours beaucoup aimé les gens qui voient le frigo des autres sur leur page Facebook, moi…)
Personnellement, je n’ai pas eu la chance de grandir dans un environnement aussi bourgeois que monsieur B. mais mes parents m’ont appris que la propreté est une bonne chose. De même, la saleté n’est pas uniquement le luxe de types pédants aux postures factices et pseudo-philosophiques. Certains y sont contraints.
Cet auteur, dont je ne lirai pas l’œuvre révolutionnaire mais que j’ai eu l’immense chance de voir sur des plateaux télés, manque tout simplement de nuances, d’indulgence, d’humilité… d’humanité.
Il est tout simplement aussi méprisant que… bête. Mais je ne me fais pas de soucis pour lui. Un de perdu dix de retrouvés. Boulevard Voltaire l’encense à ma place, ce qui doit le rendre fort heureux…
J’ai de nouveau entendu et écouté Begaudeau devant Zemmour et Naulleau. Ce Bégaudeau –j’en ai connu de semblable quand j’étais adolescent jadis au lycée Voltaire-! Quelle suffisance, quelle fatuité, quelle sottise. N’est pas le Père Ubu qui veut! Il y a en lui quelque chose de profondément révoltant que je ne parviens pas tout à fait à définir.
Votre article fait œuvre de salubrité publique par ces temps où plus que jamais les cuistres essayent de se faire passer pour des penseurs. Quant à la bêtise, “un sot trouve toujours un plus sot qui l’admire”. C’est l’éternelle histoire de la paille et de la poutre. Merci et… encore !
J. R.
Le livre de Bégaudeau fait selon moi une analyse pertinente de la société bourgeoise parisienne et plus particulièrement des bobos (parfois électeurs enthousiastes de Macron). Son analyse s’inscrit dans la lignée des Bourdieu / Passeron (Les Héritiers, la distinction …) mais n’en reste pas à la simple sociologie : il va plus en profondeur et met en évidence les contradictions logiques d’une classe sociale dominante, celle des bourgeois/bobos que j’ai le malheur de fréquenter quotidiennement.
Les réactions que l’ouvrage suscite (dans cette pseudo critique et dans les commentaires) prouvent que l’auteur a touché juste : de dérisoires considérations psychologiques ou des attaques ad personam sont opposées aux concepts. Beaucoup des lecteurs se sentent visés à raison : le lectorat de Bégaudeau coïncide presque parfaitement avec le sujet du livre.
Bégaudeau rejoint par certains aspects la critique d’Emmanuel Todd : les strates les mieux éduquées de la société française (les bac+5 et plus pour le dire vite) sont atteintes d’un crétinisme quasi généralisé et inquiétant (doublé d’un aveuglement et d’une haine de classe que Bégaudeau tente d’expliquer).
J’ai lu ce livre, c’est brillant, argumenté, drôle. Bégaudeau s’avère un véritable lecteur de Rancière, un “héritier” de Bourdieu dans la définition de l’habitus de classe. Ne vous fiez pas à cette critique qui n’a même pas l’élégance (ni une once de pensée, ni le début d’un travail …) d’en être une.
Moi j’ai adoré ce livre.Il a changé ma vie.Enfin quelqu’un qui met des mots sur ce que je ressens depuis longtemps et qui m’a isolée de beaucoup de monde.
Cette critique littéraire, ainsi que de nombreux commentaires, démontrent finalement une seule chose :
François Begaudeau dans “Histoire de ta bêtise”, vise au plus juste.
Je me délecte de ces réactions, qui n’ayant finalement rien à opposer sur le fond, préfèrent s’attaquer à la forme, ou mieux, à l’auteur.
Ces attaques ad hominem ne sont que la démonstration de l’essai de Begaudeau, à savoir cette incapacité à argumenter, réfléchir, penser.
L’esprit critique n’a de sens uniquement s’il est argumenté, sourcé, articulé et surtout débarrassé de ses propres peurs et désirs.
Bonjour,
Cette critique est difficilement compréhensible. Tout cela se donne une apparence d’intelligence mais n’en n’a pas car ce “qui se conçoit bien s’énonce clairement”. Les quelques commentaires qui vont dans le sens du critique sont assez bêtes également. Mais difficile d’être intelligent en quelques lignes…il est vrai. Je conseille à tout le monde de voir l’émission de Frédéric Taddéi avec M.Bégaudeau et M.Proust seul critique courageux à avoir accepté une controverse avec l’auteur tant “haï”, c’est assez éclairant. Et puis lire le livre quitte à se sentir “aggressé”, ce qui est parfois utile.