Agathe Mirafiore du noir à la lumière : entretien avec l’artiste

Agathe Mira­fiore crée un céré­mo­nial entre gra­vité et inno­cence, trouble et pureté. L’univers est insi­dieu­se­ment et volon­tai­re­ment trans­formé en pré­sences énig­ma­tiques et sub­ti­le­ment éro­tiques de femmes jeunes. La pho­to­graphe s’intéresse tout autant à la lumière et l’ombre qui jouent sur les corps selon une théâ­tra­lité pro­gram­mée. L’œuvre est sou­vent un chant de la fémi­nité. Indif­fé­rent à la nar­ra­ti­vité psy­cho­lo­gique, l’artiste défait la pré­sence ou la met en flo­cu­la­tion. La vie danse là où les corps rayonnent sour­de­ment. Jaillit un rap­port dyna­mique entre les modèles et la pho­to­graphe. Agathe Mira­fiore recrée une réa­lité plas­tique par­ti­cu­lière. Le roman­tisme volup­tueux n’est qu’un pré­texte et l’artiste le dépasse par d’habiles audaces en clair-obscur loin des pers­pec­tives pure­ment for­ma­listes et des quêtes sim­ple­ment émotives.

 Entretien :

Qu’est-ce qui vous fait lever le matin ?
Le désir.

Que sont deve­nus vos rêves d’enfant ?
Cer­tains se sont éva­nouis, d’autres me hantent.

A quoi avez-vous renoncé ?
J’ai renoncé à l’idée de la Per­fec­tion, plus pré­ci­sé­ment celle que les autres attendent de vous.

D’où venez-vous ?
Mon corps vient d’ici, mon cœur de là-bas, je cherche un ailleurs pour les réunir.

Qu’avez-vous reçu en dot ?
Le goût du silence, du mys­tère, de l’étrange, de l’indicible, du mys­ti­cisme et de la mélancolie.

Un petit plai­sir — quo­ti­dien ou non ?
J’essaie de faire en sorte qu’il ne soit pas petit et qu’ils soient nombreux.

Qu’est-ce qui vous dis­tingue des autres artistes ?
Ma noir­ceur comme vec­teur de lumière, comme outil de per­cep­tion, de révé­la­tion et de sublimation.

Com­ment définiriez-vous votre approche du corps fémi­nin ?
Mor­celé, par­fois brisé, les détails parce qu’ils sont nom­breux en disent par­fois plus sur l’être.

Quelle est la pre­mière image qui vous inter­pella ?
J’en ai deux qui me viennent à l’esprit, le per­son­nage d’Aurore endor­mie dans “La belle au bois dor­mant” et Uma Thur­man réin­ter­pré­tant la Nais­sance de Vénus dans le film “Les aven­tures du Baron de Münchausen”.

Et votre pre­mière lec­ture ?
« Hiro­shima mon amour » de Mar­gue­rite Duras.

Quelles musiques écoutez-vous ?
Je suis assez éclec­tique. J’en écoute beau­coup. Coco­ro­sie, David Bowie, Anohni, Joy Divi­sion, Patti Smith, Mykki Blanco, Bar­bara, The Smiths, Serge Gains­bourg, Prin­cess Nokia, Jacques Brel, Queen Mimosa… des musiques de films et beau­coup de chants tra­di­tion­nels, de chants sacrés, de mantras.

Quel est le livre que vous aimez relire ?
Les livres que j’aime relire : “Je ne suis per­sonne” de Fer­nando Pes­soa, “Les chambres, poème du temps qui ne passe pas” de Louis Ara­gon. Les livres que j’aimerais relire : “Par delà le mur du som­meil” de H.P. Love­craft, “Confes­sion d’un masque” de Yukio Mishima.

Quel film vous fait pleu­rer ?
“Inter­stel­lar”, “Law­rence Any­ways”, “Les nuits fauves” et “Les chan­sons d’amour”.

Quand vous vous regar­dez dans un miroir qui voyez-vous ?
Un être silen­cieux en latence, en tran­si­tion, en quête d’identité, d’une voix, de séré­nité et de lumière.

A qui n’avez-vous jamais osé écrire ?
Beau­coup trop de monde.

Quel(le) ville ou lieu a pour vous valeur de mythe ?
La Lune.

Quels sont les artistes et écri­vains dont vous vous sen­tez le plus proche ?
Proches je ne sais pas mais ils/elles me nour­rissent : Le Cara­vage, Sarah Moon, Hervé Gui­bert, Pier Paolo Paso­lini, Doro­thée Smith, Pedro Almo­do­var, Antoine D’Agata, Pina Bausch.

Qu’aimeriez-vous rece­voir pour votre anni­ver­saire ?
Un moment avec ceux que j’aime, y com­pris ceux qui ne sont plus là.

Que défendez-vous ?
La recon­nais­sance et la jus­tice envers les mino­ri­tés visibles et invi­sibles. Par exemple l’anti-spécisme et l’inclusivité.

Que vous ins­pire la phrase de Lacan : “L’Amour c’est don­ner quelque chose qu’on n’a pas à quelqu’un qui n’en veut pas”?
On a ten­dance à cher­cher en l’Autre ce qui est en fait au fond de nous. Du coup, on donne quelque chose d’insaisissable.

Que pensez-vous de celle de W. Allen : “La réponse est oui mais quelle était la ques­tion ?“
C
ette cita­tion fait écho à une anec­dote très per­son­nelle, ce qui est assez amu­sant étant donné que je ne la connais­sais pas…

Quelle ques­tion ai-je oublié de vous poser ?
Pourquoi ?

Pré­sen­ta­tion et entre­tien réa­li­sés par jean paul gavard-perret pour lelitteraire.com, le 28 avril 2017.

 

 

 

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