Face à la poésie paysagère de John Taylor dont le descriptif échappe au reportage, Caroline François-Rubino en ses aquarelles crée des contrepoints qui se composent toujours de deux éléments. Ils découpent des pans qui – et par exemple — « à la fin du crépuscule » s’entremêlent « au point que l’on ne les distingue plus ».
Néanmoins, ils commentent le visible plus qu’ils ne le donnent à voir. Ils ne sont jamais les esclaves du texte. Aquarelles et dessins vivent leur vie en leur propre séjour.
Toutefois, la treille poétique de Taylor se mêle au « chant » des formes de l’artiste. Paradoxal et doux, le texte se colore et se gonfle d’émotions visuelles qu’à sa manière l’aquarelle dans ses jeux de noir et de gris apaise. Existe donc un renversement : le noir et blanc de l’écriture crée la couleur, la peinture ouvre à la méditation. L’art relève plus d’un régime de la parole et celui de l’écriture de celui de l’image.
Le rapport entre poème et image propose à la fois le voyage et son détournement temporel et géographique. Et si le poème devient l’hyperbole et la métaphore des singularités du paysage, le travail de Caroline François-Rubino l’ouvre à l’épaisseur de ses racines.
Au « je suis » du paysage répond « l’autre » du regard que propose l’aquarelle. Dans cette mouvance, le parcours est particulièrement captivant et enveloppant. La poésie suit un cours à la fois précis et flou et l’aquarelle mêle le terrestre et l’aquatique. D’où cet hymen particulier où l’hymne au paysage stimule l’imaginaire.
Reste l’abandon à un courant et à des moments qui dépassent les créateurs comme les lecteurs : tous trouvent un autre œil pour voir ce qui doit être vu au sein du monde comme dans le miroir source de l’aquarelle et des mots..
jean-paul gavard-perret
John Taylor & Caroline François-Rubino, Boire à la source, bilingue traduction Françoise Daviet, Voix d’Encre, non paginé, 2017.