Alexandre Castant dans un avant-propos de son livre donne l’originalité d’un tel ensemble : « En 2005, [j’ai] commencé à relire mes textes de jeunesse, poétiques et fictionnels, relisant ces archives manuscrites ou tapuscrites oubliées, afin de découvrir ou d’imaginer quelles pages méritaient d’en être exhumées sans trop de remords ». Pour cela, il a trouvé aussi une cassette magnétique où il tenait un journal enregistré, intime, sonore et littéraire, « plus tard, je devais dire audiobiographique » précise-t-il.
A cette époque, il était question d’une expérience d’écriture poétique avec un groupe de musiciens « no-wave » où il s’estimait « un écrivain en herbe et rêveur dont la prose était crypto naissante. » Mais tout cela a mitonné « mes interludes poétiques et littéraires, qui avaient déjà la nostalgie des avant-gardes, la liberté d’initier, à mes amis musiciens, des arpèges pastel et amers, des aquarelles sonores saturées de dissonances, des nappes électriques et bruitistes faites de distorsions compactes et, parfois, un rien inspirées, aussi mélodieuses que déstructurées…».
Qu’à cela ne tienne ! Chaos devient un ensemble de poésies et de fictions des années 1985–1989 qui seront le sel et les signes futurs de son travail. Et le livre propose dans une construction à rebours « une réalité vue dans un miroir inversé » qui résonne dans un univers sombre propre au tragique de l’homme. Pour preuve, certains titres évocateurs : «Narcisse noir », « DDR, vers Berlin », « L’homme nu », « Fin de soirée », « Chaos L’absolu Pharmacies ».
Jaillissent, là où la poésie est lyrique, sonore et parfaitement écrite les pulsions de désir et de mort. Un tel Professeur des Écoles nationales supérieures d’art qui est aussi critique et préfacier de nombreux créateurs met en formes des textes variés pour signifier la musicalité du corps et de l’âme. Acceptons ici l’obscur, le rêve et l’archive. La poésie offre son ticket : au cœur, des vagues cachent leur secret, protecteur ou confident de l’invisible. La lune et le soleil observent de leur trône céleste le désir qui console de la perte.
jean-paul gavard-perret
Alexandre Castant, Chaos, Éditions Naima, Paris, 2024, 72 p. — 10,00 €.