A oublier

Pas assez divertissant

Un livre consa­cré aux excen­triques anglais du XXe siècle pro­met, a priori, de fortes doses de diver­tis­se­ment au lec­teur qui s’attend à décou­vrir des extra­va­gances frap­pantes et à se pin­cer pour croire aux plus étranges d’entre elles.
En décou­vrant le som­maire de l’ouvrage, on a hâte de savoir ce que l’auteur va nous révé­ler d’inédit, par exemple, sur le groupe de Bloom­sbury, sur la famille Mit­ford ou sur Wins­ton Chur­chill. Or, cette attente est vite déçue car, d’une part, les cha­pitres res­semblent davan­tage à des entrées d’encyclopédie qu’à des conden­sés d’anecdotes et, d’autre part, Thierry Cou­dert semble plus inté­ressé par la sexua­lité et les liai­sons des uns et des autres, que par l’extravagance pro­pre­ment dite.

C’est là que le bât blesse : le fait que la plu­part des per­son­nages évo­qués aient été homo­sexuels ou bisexuels, ou qu’ils aient échangé leurs par­te­naires (comme l’ont fait notam­ment les Bright Young Things et la fra­trie de Vir­gi­nia Woolf) pro­duit sur un lec­teur de nos jours l’effet non pas d’une extra­va­gance, mais d’un com­por­te­ment somme toute banal.
De même, les brèves évo­ca­tions de fêtes cos­tu­mées n’ont rien pour nous éton­ner, et qu’Untel ait trop bu ou se soit dro­gué nous sur­prend d’autant moins que dans la plu­part des cas, c’était connu de longue date.

Est-ce pour autant qu’on n’a rien à se mettre sous la dent en lisant Thierry Cou­dert ? Non, on appré­cie les cha­pitres consa­crés aux per­son­nages les moins connus en France, dont les Sit­well, les Lees-Milne, Edward James, David Her­bert et Noël Coward. On a aussi du plai­sir à lire les extra­va­gances de Lord Ber­ners qui invi­tait des che­vaux à prendre le thé, et qui fit construire une tour de 43 mètres de haut, pour­vue de cet aver­tis­se­ment : « Se sui­ci­der depuis cette tour com­porte des risques. » (p. 267).
Cer­taines cita­tions aussi sus­citent un vif amu­se­ment, comme celle de Paul Morand révé­lant, à pro­pos de Vio­let Tre­fu­sis (connue pour pré­fé­rer les femmes), qu’elle l’avait « violé » dans un taxi en 1925, ce qui fai­sait que, par la suite, il l’avait évi­tée « pen­dant cin­quante ans » (p. 291).
En somme, mieux vaut lire cet ouvrage de façon sélec­tive qu’en intégralité.

lire un extrait

agathe de lastyns

Thierry Cou­dert, Anglais excen­triques, Tal­lan­dier, février 2024, 332 p. – 22,50 €.

7 Responses to A oublier

  1. DO

    il demeure d’enverguRe moyenne … juste en deuxième ligne avant la fin de cet article …

  2. Myrtie

    Bon­jour,
    Votre article tombe à pic, merci pour celui-ci, votre site est sympa.

  3. Christiane Beaudoin

    Vrai­ment …
    Votre article est plus jouis­sif que le film

  4. Jacques Richard

    Votre article fait œuvre de salu­brité publique par ces temps où plus que jamais les cuistres essayent de se faire pas­ser pour des pen­seurs. Quant à la bêtise, “un sot trouve tou­jours un plus sot qui l’admire”. C’est l’éternelle his­toire de la paille et de la poutre. Merci et… encore !
    J. R.

  5. ANNE-MARIE JEANJEAN

    Grand Merci ! Vous nous évi­ter de perdre un temps pré­cieux ! AMJ

  6. Nicolas Mathevon

    Bon­jour et merci de cette cri­tique. Etant l’auteur de “Les ani­maux parlent”, je me per­mets d’informer d’éventuels lec­teurs ou lec­trices (permettez-moi de n’oublier per­sonne… ;-) ) de l’existence d’un site web accom­pa­gnant le livre. Vous y trou­ve­rez quelques extraits (ainsi que des enre­gis­tre­ments, des films…) :
    https://mathevon0.wixsite.com/website-2/phoquebarbu
    https://mathevon0.wixsite.com/website-2/copie-de-croc
    https://mathevon0.wixsite.com/website-2/extraits
    Bon voyage sonore !
    Nico­las Mathevon

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