Carlo Zinelli est né en 1916 à San Giovanni Lupatoto (province de Vérone). Dès l’âge de neuf ans, il quitte son village pour aller travailler dans les champs. En 1934, il s’installe à Vérone, où il travaille à l’abattoir municipal, et se passionne pour la musique. De 1941 à 1947, Carlo alterne des périodes de travail et de lucidité avec des crises d’agressivité et d’angoisse qui le mènent périodiquement en hôpital psychiatrique, où il subit des électrochocs et des traitements à l’insuline. En 1947, il est définitivement interné pour schizophrénie. Il va alors s’enfoncer dans un isolement où son langage même deviendra incompréhensible pour l’extérieur.
Pendant des années, sa créativité se borne à des dessins sur le sol et des graffitis sur les murs, bien qu’une forme d’ « école de peinture » existe au sein de l’hôpital tout en dispensant des cours d’apprentissage classique de l’art. En 1957, l’occasion lui est réellement donnée de s’exprimer et de développer son talent.
Des expositions des œuvres faites à l’atelier sont organisées, dans une galerie de Vérone, puis à Milan et Rome. Carlo sera même le seul peintre italien présent à l’exposition Insania pigens à la Kunsthalle de Berne (1963). Peu de temps après, Jean Dubuffet découvre ses œuvres et en acquiert un nombre important, qu’il inclut dans sa collection de l’art brut.
Les peintures de Carlo Zinelli sont immédiatement reconnaissables, avec leurs silhouettes humaines ou animales percées de trous ou d’étoiles. Elles font inévitablement penser aux dessins d’enfants par leur apparente naïveté, Les spécialistes en psychiatrie ne manquent pas d’y relever nombre d’éléments qu’ils estiment propres à la schizophrénie.
Il existe un lien de parenté des peintures de Carlo Zinelli avec ses dessins rupestres préhistoriques (et au-delà avec les représentations chamaniques de peuples traditionnels). Elles peuvent même aller parfois jusqu’à l’abstraction.
Dans certaines peintures se note la présence d’inscriptions, plus proches d’onomatopées ou de cris, qui vont jusqu’à remplir en grande partie l’espace. Carlo a aussi intégré parfois des collages divers. Les figures occupent une place primordiale. Souvent désordonnées, elles sont parfois organisées en alignements et répétitions.
Les sujets de prédilection de Carlo Zinelli tournent autour de la nature (avec un bestiaire très important où les figures de l’oiseau et du cheval ressortent). Les figures humaines sont omniprésentes : s’y retrouvent beaucoup d’allusions sexuelles, que ce soit de manière explicite ou sous forme de symboles qui arrivent même à se mêler à des thèmes religieux.
jean-paul gavard-perret
Carlo Zinelli, Cinquante ans d’héritage artistique, L’Appart Renoma, Paris, du 3 avril au 17 mai 2024.