Sylvie Baron, Des noces en or

Un mariage pour la vie ?

Chan­te­lauze se meurt. Cette bour­gade du Can­tal est vic­time de la déser­ti­fi­ca­tion rurale. Mar­cel Pujol, le maire depuis deux man­dats, a pro­mis de réveiller la cité. C’est devenu son obses­sion. Simone Fres­sange, la secré­taire de mai­rie a dû numé­ri­ser les archives de l’état civil. Elle a constaté que depuis son ins­tau­ra­tion, en 1792, 4 615 mariages ont été célé­brés et… pas un seul divorce ! Pujol tient le moyen de faire revivre sa com­mune.
Dix ans après, Fanny, dans une récep­tion pari­sienne, découvre que Chan­te­lauze est deve­nue célèbre, appelé Le vil­lage du bon­heur. Ce n’est pas le sou­ve­nir qu’elle en garde, ayant vécu de six à qua­torze ans dans les lieux. La noto­riété a encore grandi quand une star s’est mariée là et qu’elle file, depuis, le par­fait amour.
Jean-Cyril est pas­sionné par les phé­no­mènes sociaux, par­ti­cu­liè­re­ment la socio­lo­gie du mariage, sujet pour lequel il est inta­ris­sable. Que Fanny connaisse le vil­lage le motive. Il est ami avec Mehdi, un jour­na­liste d’investigation qui trouve étrange cette situa­tion dans la durée. Ils per­suadent Fanny et Char­lotte, sa colo­ca­taire et amie, de les aider à enquê­ter sur place. Ils doivent s’improviser can­di­dats au mariage. Mais ils ne savent pas qu’ils vont se retrou­ver au cœur d’une affaire…

Une fois encore Syl­vie Baron place son intrigue dans le Can­tal pro­fond, dans ces zones rurales déser­tées par les popu­la­tions. Les petites entre­prises ont fermé leurs portes les unes après les autres, obli­geant les habi­tants à quit­ter ces lieux pour trou­ver du tra­vail. Cette des­truc­tion d’un tissu pro­duc­tif devrait ame­ner les res­pon­sables devant la Jus­tice.
La roman­cière arti­cule tout son récit autour du mariage, fai­sant livrer à ses per­son­nages des chiffres authen­tiques, des réflexions, des ana­lyses per­ti­nentes. Elle décrit toute une orga­ni­sa­tion pour satis­faire les demandes de plus en plus nom­breuses. Des bou­tiques pro­posent tout ce qu’il faut pour un jour pareil, les hôtels, les loca­tions réser­vées aux couples qui attendent de pou­voir convo­ler. Il faut habi­ter la com­mune depuis quelques temps pour pou­voir émar­ger au registre d’état-civil.

Elle conçoit un qua­tuor de pro­ta­go­nistes aux carac­tères bien dif­fé­rents pour offrir une vaste pano­plie d’opinions. Fanny est expert-comptable, rigou­reuse, Char­lotte est une artiste au com­por­te­ment fan­tasque. Jean-Cyril, le socio­logue, est rigide, ne s’appuyant pour ses argu­ments que sur des chiffres, des sta­tis­tiques. Quant à Mehdi, pigiste, il rêve de réa­li­ser le repor­tage qui le fera recon­naître comme un véri­table jour­na­liste d’investigation.
Mais l’atmosphère insou­ciante de départ, cette enquête dans laquelle ils veulent s’investir va, peu à peu, se char­ger de menaces, dans ce petit vil­lage où tout se sait, tout se tait, où on pro­tège les secrets.

Des noces en or offrent un nou­veau séjour dans ce Can­tal que l’auteure appré­cie par­ti­cu­liè­re­ment pour son atmo­sphère, ses pay­sages, ses bour­gades… Elle struc­ture une intrigue attrac­tive pour sa gale­rie de per­son­nages et pour les situa­tions aux­quelles ils sont confrontés.

serge per­raud

Syl­vie Baron, Des noces en or, J’Ai Lu n° 13 827, sep­tembre 2023, 352 p. — 8,00 €.

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Filed under Pôle noir / Thriller

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