Sandrine Cohen, Tant qu’il y a de l’amour

Un roman d’une grande humanité

Après son excep­tion­nel Rosine, une cri­mi­nelle ordi­naire (J’Ai Lu, sep­tembre 2022), San­drine Cohen pro­pose une nou­velle his­toire, une étrange famille confron­tée à un drame terrible.

À trente-six ans, Suzanne vit dans un pavillon de Saint-Denis hérité de sa mère. Elle a quatre enfants, de quatre pères. Achille a dix-sept ans et un géni­teur musi­cien. Jules, onze ans, a pour père Clé­ment, qui a cinq enfants avec lui. Arthur a un an d’avance. Il est dans la même classe que Jules. Mathilde, la petite der­nière, a pour père Toni, un violent.
Suzanne porte un amour immense à ses enfants, mais elle porte éga­le­ment une plaie pro­fonde venant de son enfance. Suzanne est res­tée, à cer­tains points de vue, une enfant. Et Ismaël est entré dans sa vie. Il est beau, il est jeune et il est impré­vi­sible. Elle ne sait jamais quand il revien­dra la voir. Elle envoie des cour­riels, guette des mes­sages qui n’arrivent pas. Achille tente d’organiser la vie de la tribu.
Et c’est un drame, ces atten­tats de novembre 2015 vont bou­le­ver­ser le clan. Suzanne n’en peut plus. Toni est sorti de pri­son et veut reprendre sa fille. Il les bat­tait. Ismaël est devenu jaloux tout en étant tou­jours aussi absent. Suzanne décide de par­tir mal­gré l’amour pour ses enfants, les aban­don­nant.
Ceux-ci vont devoir sur­vivre, faire bloc face aux dan­gers qui les guettent…

Si la roman­cière ancre son récit sur Suzanne, cette belle femme à la recherche éper­due de l’amour, elle donne de grands rôles aux membres de la fra­trie, ainsi que les ren­contres que cha­cun va être amené à vivre. Suzanne a une vie qui n’est faite que d’abandons, de tra­hi­sons, de pro­messes non tenues. Ce sont des ren­contres qui se ter­minent mal. Les hommes qu’elle a aimés fol­le­ment, au point de vou­loir un enfant de cha­cun d’eux, l’ont lais­sée. Le pre­mier et le troi­sième ont dis­paru, le second a une autre famille et le qua­trième les bat­tait, elle et Mathilde. Un nou­vel arri­vant va encore la déce­voir. Et puis, ce sont les enfants qui se sont orga­ni­sés pour ten­ter de vivre le mieux pos­sible.
Avec cette gale­rie de per­son­nages qui pos­sèdent tous des zones d’ombre, la roman­cière place son lec­teur au cœur de l’action et donne une his­toire atta­chante, d’une grande sen­si­bi­lité sans jamais juger les actes des uns et des autres, sans être mani­chéenne. Elle cite poèmes et chan­sons qui trouvent natu­rel­le­ment leur place dans le dérou­le­ment de l’intrigue, illus­trant un moment par­ti­cu­lier pour l’un ou pour l’autre.

Ce roman noir, mal­gré l’amour qui est très pré­sent, se lit avec avi­dité tant les acteurs du drame sont émou­vants et leur sort touchant.

serge per­raud

San­drine Cohen, Tant qu’il y a de l’amour, J’Ai lu n° 13 869, août 2023, 448 p. — 8,90 €.

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Filed under Pôle noir / Thriller

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