“Ne cherchons pas à quitter l’instant avant que n’advienne son incandescence. Laissons en nous son gisement continûment s’accroître.” écrit Pierre Cendors. Il s’agit donc de s’y arrêter afin d’intensifier notre existence.
Chaque moment, même celui qui semble pouvoir être passé sous silence tant il semble anodin, reste un apprentissage à ne jamais oublier — d’autant que sans doute l’inconscient lui-même ne s’en laisse pas compter. D’où l’asymétrie habituelle entre ce qu’on croit ne pas voir et ce qui nous touche.
Cendors en a fait l’expérience dans les montagnes et leurs forces plus ou moins muettes. Mais il sait se laisser traverser de leurs murmures comme celles “des nuages, des pierres, des sources et des forêts massées au sol, que cingle inépuisablement l’averse des lumières.“
Afin de le souligner, le poète se sert de l’étendue blanche des pages, images de l’immensité silencieuse sur laquelle les mots sont là pour rappeler “ce qui est sans parole.” D’où ce texte au lignes sinueuses, tourbillonnantes, stimulantes qui enseignent comment quitter la rationalité pour se laisser emporter par le hors temps presque “pur” à travers celui qui semble ne faire que passer.
jean-paul gavard-perret
Pierre Cendors, L’Horizon d’un instant, L’Atelier Contemporain, Strasbourg, 2023, 96 p. — 20,00 €.
Très bel article qui, allié aux magnifiques citations, donne très envie de découvrir ce recueil !