Une guerre religieuse interplanétaire
Il y a deux cents ans, quatre dieux créent l’ordre du Panthéon, instaurent la Grande Renaissance et imposent leur religion comme la seule et unique. Pour ce faire, et convertir en masse, ils installent les légions panthéistes chargées d’éradiquer toutes les autres croyances.
Jusque-là, on ne peut pas taxer Sylvain Runberg d’une imagination débordante car n’est-ce pas ce que font la quasi-totalité des religions : imposer, par tous les moyens, leurs dogmes ? Mais, il se réserve !
Puis, et c’est là où le scénariste met en œuvre son imagination fertile, la sérénité apparente se fissure. Ces dieux semblent avoir un souci avec un bio-grimoire qu’ils font rechercher activement depuis leur installation, jusque-là, sans succès. Parallèlement, la nouvelle traque amène le trio dans une zone si dangereuse de la galaxie qu’elle a été, depuis toujours, évitée.
Dans un astrobar, Little Mercur déclenche une bagarre en insultant la chanteuse pour que Xia puisse s’emparer, dans le sous-sol, du cerveau de Peroïd, le plus honoré des saints akenaïdes. Ils sont chasseurs de reliques, les meilleurs, disent-ils.
Au cœur de l’Olympus, le divin Quatuor — Jupiter, Vénus, Aresia et Charon – fait part de son mécontentement à la générale Ziscarod, chef suprême des légions panthéistes. Il reste encore trop, à leurs yeux, de déserteurs et de trafics de reliques. Ils se sont imposés comme les seuls dieux dans la galaxie, anéantissant les 1863 religions. Mais, ils ne supportent pas qu’il reste quelques millions d’impies sur les 670 milliards de sujets.
Alors que Xia et Little Mercur feraient bien une pause, un nouveau client, Sir Ouranos, les appâte avec la promesse d’une énorme prime. Sur le lieu de rendez-vous, le duo est surpris par l’arrivée d’un colosse. Il est imposé par le client, comme la présence d’un droïde pour vivre en direct leur avancée, et présenté comme un ex-centurion du Panthéon.
Mais, pour une somme pareille, la relique doit être bien difficile à atteindre. Et le trio, s’il survit, ne sera pas au bout de ses surprises…
Si le récit est une suite d’actions toniques où les héros font face à des dangers de toutes natures, le scénariste concocte un complot cosmique absolument remarquable. Il instille un nombre conséquent de réflexions sur l’univers religieux, sur la variété des croyances, sur la volonté de domination allant jusqu’à l’instauration d’une dictature féroce.
Dans ce récit de science-fiction, cohabitent humains, aliens et humanos, tous hauts en couleurs. Le scénariste intègre une belle part d’humour, que ce soit dans les dialogues ciselés, dans des réflexions caustiques. Il fait de son héroïne une adepte de la déesse Metavrilla dont l’influence n’est sensible qu’après l’absorption massive de liqueurs “sacrées”. Les adeptes meurent en masse d’une cirrhose du foie.
Chaque planche dessinée et mise en couleurs par Grun est un véritable tableau. Il offre des vues époustouflantes de l’espace, fait preuve d’une imagination phénoménale pour créer des vaisseaux, une faune et une flore démentielle. Il livre des combats à couper le souffle, des pleines planches de paysages stellaires. Grun se surpasse et réalise une suite de pages toutes plus attractives les uns que les autres que ce soit pour ses personnages ou pour ses décors. Quel talent !
Un beau cahier d’esquisses complète l’album.
Une intrigue aux très nombreux ressorts, élaborée avec un soin méticuleux, un graphisme qui surpasse ce qu’on a coutume de voir en la matière, font de cet album une référence.
serge perraud
Sylvain Runberg (scénario) & Grun (dessin et couleurs), Space Relic Hunters, Éditions Daniel Maghen, août 2023, 112 p. — 23,00 €.