Alexandre Bonnet-Terrile est né à Paris en 1999. Il a publié trois recueils de poésie en créant un renouveau de la rime, du mètre et du rythme et ce, en une variété de poèmes. A vingt-quatre ans, un tel poète casse la langue pour l’explorer et sans jouer des rapprochements trop lourds, il existe toutefois du Rimbaud chez un tel écrivain.
Il tire de sa jeunesse même et comme cette ombre tutélaire une manière de triturer le langage pour en tirer des réponses sur lui comme sur le quotidien qu’il rameute mais sans s’en contenter.
Le passage suivant en témoigne : “Comble d’un bleu vêt un ciel nu Paru Un ciel sans monde Jamais oiseau n’y fut Foudre n’en tombe Nuages lents ne s’y confondent Un ciel me plaît Mais parce que mort y abonde Je m’y en vais comme l’intrus Et comme un mort j’y suis partout le bienvenu”.
“Le dormeur du Val” n’est pas loin. Et comme chez l’auteur des Illuminations, le lecteur touche à un hermétisme lyrique comme à un réalisme et une bouffonnerie
Celle-ci n’exclut en rien la gravité mais aussi l’éloge douteux et baroque de la médiocrité, des grands sentiments dans une langue alambiquée volontairement mais parfaitement lisible et vivante.
Vingt-cinq poèmes sont distribués en douze parties et l’auteur fait jouer le rythme des vers de manière torturée et tortueuse. C’est du grand art : s’y entend une respiration, s’y écoute une voix neuve.
La poésie devient ici l’essence convoitée du songe, comme si l’abrupt de la lune sur l’esprit, ne cessait de l’influencer. Il y a là parfois des morbidités giclant d’angoisse avec mâchoire de fer, mais à la base ne s’oublient ni la lutte à être ni l’incessante course du flux verbal et de la vie vers un cosmos.
Bref la poésie en cette ouverture et cette renaissance déploie une vision : celle d’un chercheur plongeant aux puits obscurs une lumière à faire rejaillir comme broyée vers les étoiles. Parfois une lassitude qui semble déjà mortelle saisit le poète mais il a tôt fait de reprendre sa marche.
jean-paul gavard-perret
Alexandre Bonnet-Terrile, Portrait du bienvenu, Préface de Christian Doumet, Illustrations de Nicolas Alquin, Fata Morgana, Fontfroide le Haut, septembre 2023, 80 p. — 16,00 €.