Par elle, nous sommes soumis au temps et au mythe. Sa réalité se livre par fragments dans l’écume de ses peintures. Ses souffles au réveil sont des fragrances verticales, des concordances infinies mais aux intensités fugaces. Elle pose chaque image dans un fragment de son absence.
Son courant à l’intérieur de nous ouvre une grande voie. Qu’importe si son histoire est sans parole. Et les mots restant dans sa bouche, nous n’avons plus besoin de parler. D’autant qu’elle en sait sur nous beaucoup plus que nous-mêmes.
Dans le silence infini, elle poursuit ses danses mystérieuses en foulant les mâles car ils ne sont faits que de terre. Pour le comprendre, un souffle suffit ; il ouvre des passages inconnus, des raccourcis oubliés, d’autres croisements. Les amants y vont l’un vers l’autre à la vitesse de la lumière.
C’est un champ de forces, un théâtre magnétique. Il fait notre chair humaine, le corps de notre pensée. Elle ne double pas le monde, mais jette quelque chose en lui pour le renverser. Met l’un dans l’autre. L’un dans le corps de l’autre. Sa respiration nous aspire vers des profondeurs cachées où nage le poisson volant jusqu’à la pluie des moussons, s’enfonce dans l’éphémère de la mer pour faire fondre les deux continents de la nostalgie et le rêve.
Les caresses de la mer y sont entières et les secondes empilées contre la chute. Elles sont la matière de notre esprit et de notre émotion. Non celle qui terrasse, mais celle de la communion.
jean-paul gavard-perret