Après qu’il soit parti, Auréliane se love dans son canapé pour échapper quelques temps au réel. Auréliane est hospitalisée. Elle s’est bien arrangée en tombant dans les escaliers. Sa tête est très douloureuse, des côtes sont cassées. Elle n’a plus l’usage total de son bras droit depuis septembre.
La visite de sa belle-mère ne la réconforte pas. Celle-ci continue de se demander comment son Fabien, promis à un si bel avenir, a pu s’enticher de cette petite universitaire d’un autre milieu. Et Fabien lui promet un séjour idyllique en Bretagne pour repartir du bon pied.
Elsa, l’infirmière, n’est pas dupe. Elle a compris qu’Auréliane est une femme sous emprise, une femme battue. Pourtant, c’était une brillante universitaire qui pouvait entrer à l’Ifremer. Elle s’est laissée convaincre de ne pas passer sa vie dans un labo, Fabien a tellement besoin d’elle…
Si, pendant quelques jours, la vie semble un rêve avec le séjour luxueux qu’il lui offre, la réalité revient très vite quand elle émet le souhait d’aller voir sa grand-mère qui habite tout près…
Auréliane est une jeune femme à l’avenir professionnel prometteur avec son bagage universitaire et des projets innovants. Elle va tomber sous la coupe d’un ignoble individu. La romancière décrit avec un effrayant réalisme la situation de cette femme après quelques années de mariage. Elle n’omet rien du comportement de cet époux qui exerce une emprise féroce.
Elle donne toute la gamme des moyens utilisés, de la câlinerie à la violence, de la culpabilité entretenue à la mise en valeur face aux tiers. Il la fait passer pour une épouse indispensable — il a tant besoin d’elle — avant de la traiter de pauvre fille qui ne serait rien sans lui. Ce sont les crises de jalousie, les coups, les pseudo-remords.
Mais Nathalie de Broc livre aussi les sentiments, les émotions d’Auréliane qui veut encore croire à leur amour, qui lui cherche des excuses, qui justifie son comportement violent lorsqu’il la frappe. Elle n’a pas su être à la hauteur de ce qu’il attendait. Elle se persuade qu’elle est nulle et qu’il a raison de la mépriser.
Il lui promet qu’il va changer, qu’il est surchargé de travail alors qu’elle ne l’aide pas, que c’est, en fait, de sa faute s’il agit ainsi. C’est un cercle vicieux, un cycle infernal qui semble sans fin.
Autour du couple, l’auteure installe une suite de protagonistes tant dans le registre maléfique que bénéfique. C’est ainsi que vont se déployer des trésors de patience, d’imagination pour contrer le mal, pour éradiquer cette dépendance. Elle brosse de magnifiques portraits, que ce soit Elsa, sa grand-mère et bien d’autres.
Avec un style efficace, une écriture incisive, elle raconte l’enfer vécu par Auréliane et le long chemin pour sortir de cette domination, les difficultés rencontrées et l’aide nécessaire pour, enfin, briser ces chaînes.
Avec L’Espoir sur le rivage, Nathalie de Broc signe un récit terrible quant au sort de son héroïne, un sort trop souvent partagé par de très nombreuses personnes. On ressort, de ce roman addictif, hanté longtemps par le souvenir d’Auréliane.
serge perraud
Nathalie de Broc, L’Espoir sur le rivage, Les presses de la Cité, coll. “Terres de France”, juin 2023, 352 p. — 22,00 €.