Prégnantes transformations intimes
Un bruit sourd, une forme se meut dans le lit : la couette bouge de façon curieuse. En émergent des bouts de membres (pieds, mains) surdimensionnés. Le corps de Killian Chapput est utilisé dans son caractère atypique. Grand, gauche, leste, il alterne les figures gymniques avec des mimiques simples, non dénuées d’un aspect animal.
Une voix off, féminine, métallique, égrène des définitions, des données objectives. De nombreuses étymologies donnent avec raison une obédience scientifique au propos. On conjoint l’expérience existentielle avec des fragments de traité d’entomologie.
La situation de l’ex-voyageur de commerce se dégrade progressivement. Les paroles douces et lucides de la sœur de Gregor Samsa constituent le dernier lien entretenu avec l’humanité, c’est-à-dire avec l’amour désintéressé.
C’est une expérience délicate, entre monstration et introspection : le spectacle constitue une interprétation juste de La métamorphose, habillée et habitée par la musique électronique délicate et puissante de Benoît Olivie. Un bel exercice de stylisation d’une grande œuvre littéraire, baroque et suggestif, restant lisible et visuellement agréable.
Le travail scénique constitue une performance esthétique et athlétique : on est entre le mime et la gymnastique, pour constituer une scénographie compulsive. Le principe qui préside à la représentation est celui d’une alternance entre vision fantastique et monstration de nos difficultés quotidiennes. C’est la précarité de nos engagements habituels qui est exhibée et interrogée.
christophe giolito
La métamorphose
d’après Franz Kafka
Mise en scène Stéphanie Slimani
Interprète : Killian Chapput
Création sonore Benoît Olive ; régie Emilie Suzzoni ; décor Le Nez ; avec les voix de Johan Cerisier, Laurie Rudolff, Anaïs Pascal Savoye et Pascal Fromage.
Compagnie La Divine Usine https://www.ladivineusine.com/
Au théâtre du Rempart, 56, rue rempart saint Lazare 84000 Avignon +33 (0)4 90 85 37 48
du 7 au 29 juillet — Relâche les 13, 20 et 27 juillet à 14h30 durée 52 minutes.
soutien : NO/ID Lab Le Télégraphe, Le Volatil, l’espace Henri Tisot. Coréalisation Théâtre du Rempart