Marjorie Perloff rassemble des citations de Wittgenstein ou autour de son oeuvre pour en tirer ses propres interprétations. Elle crée en même temps une sorte de biographie romancée dans ce qui tient pourtant et à la base d’un essai contaminé par ces effets de fiction, non sans rapport avec le réel de l’écrivaine.
Dès lors, ce qui pourrait rester un essai théorique se transforme en une hybridation opératique issue du Tractatus de Wittgenstein.
Une certaine vision existentielle passe ainsi par une compréhension duale entre l’abstraction de la méditation philosophique et la plasticité d’une déambulation vitale. Le texte devient ce faisant une marqueterie de réflexions initiées par l’œuvre de philosophes comme des écrivains que Wittgenstein influença et continue à influencer, de Gertrude Stein, Samuel Beckett à Robert Creeley et Rosmarie Waldrop entre autres et auxquels l’auteure fait un sort analytique.
Il y a ainsi et par la bande une approche par ces auteurs des divers genres littéraires à l’exception de la poésie que la créatrice évacue dans son refus du lyrisme et de sa facticité.
Tout cela est ambitieux et l’auteure se balade entre philosophie, roman et les formes de vie qu’elle et il exaltent avec un plaisir d’une sorte de conversation avec elle-même sans que cela ne tombe dans le pur soliloque là où la langue devient une aventure riche lorsque cela s’impose en détails et anecdotes dissonantes.
jean-paul gavard-perret
Marjorie Perloff , L’échelle de Wittgenstein — Le langage poétique et l’étrangeté de l’ordinaire, traduction de Robin Séguy, Éditions Questions Théoriques, février 2023, 352 p. — 20,00 €.