Drigailles est une sorte de voyage en syncopes, de “comptine au pouls faible” mais brute de décoffrage et sans la moindre flatterie.
Les tripes de l’auteur y sont à nu mais en rien étalées sinon en breloques, copeaux, quignons et bagatelles.
On peut en rire. On le doit même. Mais pas que. Nous pataugeons au milieu des fragments épars mais pas forcément disjoints. On s’y encanaille à qui mieux mieux là où les horloges dégoisent en tournant à l’envers mais où la fièvre monte - et pas seulement à El Paso où dans les salles de cinéma où les amoureux s’embrassent.
Des slogans s’emmêlent, le lecteur y va à la pêche. On devine ce qui peut l’être entre marges et parenthèses. C’est une sarabande où, dans une danse techno, l’auteur numérote ses abattis, ne signe plus d’autographe, fait presque n’importe quoi — le presque est important.
Il coupe au besoin quelques pages, ouvre le ventre avec des petits ciseaux mais avec les sommations d’usage.
Nous sommes autant à côté de la langue que dedans. Cà roule et reprend. En avant doute ! Entre présence et éclipses, des cigognes sont perchées sur des cils, et des cygnes sur des signes de baies de cochons.
Quoi de mieux qu’un tel Swing littéraire qui laisse autant abasourdi que sonné ?
jean-paul gavard-perret
Daniel Pozner, Drigailles, Propos 2 éditions, coll. propos à demi, juin 2023, 128 p.