Fantaisie humaine
Bruno Barbey crée une suite de scènes parfois insensées mais où l’angoisse semble exorcisée. Il existe parfois du Pasolini en de telles prises où se retrouve sur la plage d’Ostia une bande de “ragazzi e ragazze” en slips de bain et en bikini.
Nous sommes au début des années 60. Bruno Barbey s’ennuie au bord du lac Léman où il fait ses études et part en Italie. Dans ce voyage, on croit entendre hors champ “Nata per me” d’Adriano Celentano ou encore les slows de Bobby Solo ou Gigliola Cinquetti.
Et le photographie quitte son domaine de la publicité pour devenir reporter génial et enjoué.
Ses portraits restent l’équivalent européen des “Américains” de Robert Frank. Se retrouve dans de tels clichés l’atmosphère des films de Roberto Rossellini, Vittorio de Sica, Luchino Visconti et Pier-Paolo Pasolini déjà cité.
En 87 tirages, le photographe retrace son itinéraire du Nord au Sud de l’Italie, de Milan et la Toscane à Naples et la Sicile. C’est d’ailleurs grâce à cette série que Bruno Barbey a pu entrer à l’agence Magnum. Toute la maîtrise de l’art du portrait est là.
Le photographe nous entraîne dans une fantaisie humaine au sein par exemple d’une improbable garçonnière — piège à filles mais où règne, encadré, un Christ dolent au dessus du lit des plaisirs — ou d’une vespa qui devient — vu ses occupants — à un quasi véhicule à quatre roues.
jean-paul gavard-perret
Bruno Barbey, Les Italiens, Editions Delpire & co, Paris, 2023, 184 p. — 42,00 €.