Que n’ont-elles pas fait écrire !
Avec les aventures d’Alix, ce Gaulois intégré dans la société romaine, le lecteur a pu visiter la quasi-totalité de l’Empire. Cette fois-ci, il est en Grèce, aux prises avec des disparitions et une femme de caractère qui voulant faire revivre le règne des Amazones qui, selon la mythologie grecque, avaient fondé un royaume. Celui-ci, se situait dans la région du Pont Euxin, au bord de la mer noire, sur les rives du fleuve Thermodon.
Valérie Mangin propose un récit qui oppose des hommes à des femmes qui entendent gérer leur vie. Elle reprend ces Amazones, ce peuple de guerrières dont on sait peu de choses. La majorité des écrits les concernant sont bien postérieurs à leur existence et nourris de certains fantasmes. Il semble, toutefois, qu’elles menaient des activités jusqu’alors l’apanage des hommes comme la guerre, confiant à des esclaves masculins le soin des tâches ménagères. Cependant, il fallait concevoir une intrigue et, comme dans toutes sociétés, les membres qui veulent accéder au pouvoir ne manquent pas. Et l’intervention d’Alix se justifie par une situation périlleuse.
Thessalonique, la capitale de la province romaine de Macédoine, est en proie à la peur. Des femmes disparaissent. Une aubergiste, alors qu’elle ferme son établissement, est attaquée par deux silhouettes encapuchonnées.
Le lendemain, la foule est à l’hippodrome où se déroule une course de chars. Dans l’un d’eux, Alix est aux prises avec Délia une conductrice expérimentée. Il finit par l’emporter.
Alix est là, avec Enak, car ils ont été invités par un ami. Délia se revendique d’une lignée royale. Elle a transformé son domaine en royaume amazone d’où les hommes sont exclus, sauf les esclaves.
Soudain, la foule gronde. La nouvelle selon laquelle l’aubergiste a été retrouvée morte circule. Avec la disparition de quatre femmes le mois dernier, ce meurtre soulève l’indignation. La foule reproche à Cornelius Carbo, le propréteur de la province, son incapacité à assurer la sécurité. C’est alors que Délia propose son aide, ses filles connaissent bien la ville.
Au banquet qui suit les festivités, Enak et quelques adolescents décident de s’introduire chez les Amazones pour prendre la ceinture de Délia. Et Alix doit payer de sa personne car…
Valérie Mangin intègre le vol de la ceinture de Délia en référence au neuvième travail d’Héraclès qui, à Thémiscyre, s’est emparé de la ceinture d’Hippolyte, la reine des Amazones, pour la remettre à Eurysthée.
Chris Millien assure un dessin réaliste au possible, proposant un Alix proche de celui de Jacques Martin. Il donne des décors finement dessinés, des scènes de foule détaillées, des courses de chevaux et d’humains très élaborées. Les corps sont dévêtus comme le voulaient les tenues vestimentaires de l’époque bien que les dames et jeunes filles restent assez couvertes. Le dessinateur ne s’autorise que quelques ombres pouvant faire deviner les courbes d’une poitrine, le galbe d’une chute de reins. Jean-Jacques Chagnaud assure une mise en couleurs d’une belle efficacité et d’une grande beauté.
Ce nouvel opus des aventures de l’inoxydable Alix se lit avec plaisir pour une intrigue menée avec vigueur et mise en images avec talent.
serge perraud
Valérie Mangin (scénario), Chrys Millien (dessin) & Jean-Jacques Chagnaud (couleurs), Alix — tome 41 : La Reine des Amazones, Casterman, février 2023, 48 p. — 12,50 €.