Jean Dufaux poursuit la construction de cette fresque épique, commencée il y a maintenant vingt ans, où sorcières et démons se livrent une lutte acharnée.
Les armées d’Elgar, le prince légitime, et celles de Vivien des Aguries, le bâtard, se sont livrées bataille pour le pouvoir sur le royaume. Celles de Vivien l’ont emporté et sa marche vers le trône semble assurée. Cependant, un obstacle inattendu se dresse, une apparition issue de l’enfer : Tête noire. Celui-ci avait été entraîné dans la mort par le sacrifice d’une sorcière. Or, Jamaniel, la reine, l’a ramené à la vie pour servir ses intérêts.
Elgar, amputé du bras droit, est soigné par une médecin-mécanicien qui lui a posé un bras articulé. Il cherche alors à reprendre le combat, un combat… contre sa mère.
Mais Tête noire a d’autres projets que ceux de Jamaniel. Il veut régler ses comptes avec le passé, un passé qui comprend Oriane, la fille de dame Ceylan. Face à cette situation nouvelle, Sanctus rassemble les sorcières qui forment l’Inferno Flamina. Elles convoquent Cryptos, le démon, le seul capable de suggérer la voie à suivre pour vaincre Tête noire…
Ce présent cycle décrit les événements tragiques qui ont nourri les péripéties racontées dans Les Chevaliers du Pardon et surtout dans Sioban. On retrouve toute la verve du scénariste qui dévoile un jeu fabuleux où il entremêle tragédies, trahisons, luttes pour le pouvoir et le combat éternel du Bien contre le Mal, de l’Amour contre la Haine.
En ressuscitant Tête noire, il dispose d’un magnifique méchant qui bouleverse les plans, les ambitions, des uns et des autres. Mais il apporte aussi des réponses à quelques interrogations, gardant toutefois quelques révélations dans sa manche pour nourrir l’intrigue du tome 4, Vers l’Eruin Dulea, à paraître en octobre 2025.
Le graphisme de ce cycle a été confié à Béatrice Tillier qui réalise un dessin et une mise en couleurs pour des planches sublimes. Quel talent pour mettre en scène cette histoire qui fait de chaque vignette un tableau. Tout est précis et détaillé, que ce soit la représentation des protagonistes, leur gestuelle, les accessoires dont ils se servent, les vêtements dont ils sont parés.
Avec ce nouvel album, Jean Dufaux, si besoin était, démontre son art prodigieux du récit, un récit sublimé par une Béatrice Tillier au sommet de sa maîtrise graphique.
serge perraud
Jean Dufaux (scénario) & Béatrice Tillier (dessin et couleurs), Complainte des landes perdues — Cycle 3 : Tome 3 — Regina obscura, Dargaud, mars 2023, 56 p. — 15,00 €.