Ruth Ware, Le Chalet des disparus

L’assas­sin est dans la place…

Dans cette nou­velle his­toire, Ruth Ware reprend le thème du huis clos avec un groupe isolé en pleine mon­tagne pen­dant une tem­pête de neige. Les dif­fi­cul­tés maté­rielles s’accumulent pour les nau­fra­gés. A celles-ci s’ajoutent une dis­pa­ri­tion mys­té­rieuse et des morts vio­lentes.
La roman­cière fait pas­ser tout le récit par Liz et Erin qui racontent ce qu’elles pensent, voient, entendent, devinent. Cette construc­tion nar­ra­tive est par­ti­cu­liè­re­ment inté­res­sante car elle per­met de don­ner des visions dif­fé­rentes de situa­tions, d’actions, de réactions.

Erin, l’hôtesse, et Danny, le cui­si­nier, accueillent, dans un cha­let de mon­tagne, les membres d’une entre­prise venus en sémi­naire. Au lieu des neufs atten­dus, ils sont dix, Liz étant invi­tée au der­nier moment. Tous par­ti­cipent ou ont par­ti­cipé à la créa­tion et au déve­lop­pe­ment de Pis­ter, une appli­ca­tion Inter­net qui per­met d’entendre, en temps réel, la musique écou­tée par des célé­bri­tés.
Comme dans tous les groupes, il y a des meneurs et des menés. Liz a par­ti­cipé au début de l’entreprise, a joué un rôle impor­tant avant de la quit­ter, il y a trois ans. Elle se demande pour­quoi elle est là et regrette d’avoir accepté l’invitation.

Si l’installation dans les lieux se déroule sans trop de dif­fi­cul­tés grâce à la célé­rité des deux agents, les pro­blèmes naissent vite quand est abor­dée la ques­tion qui motive la tenue du sémi­naire. Faut-il accep­ter le rachat de Pis­ter par un repre­neur ? La ten­sion s’installe entre ceux qui sont favo­rables et ceux qui sont oppo­sés à la vente. Or, Liz, avec son petit nombre d’actions, peut faire pen­cher la balance pour une option ou une autre.
Le temps se gâte, la neige tombe en abon­dance. Mal­gré cette mau­vaise météo, quelques meneurs décident d’aller skier, pen­sant atté­nuer les ten­sions. Après une mati­née de glisse, ils décident d’une der­nière des­cente, sur la piste noire pour les plus che­vron­nés, sur la piste bleue pour les autres. Lorsqu’ils rentrent, Eva est absente. Erin, bonne skieuse, décide d’aller à sa recherche.

C’est alors qu’une énorme masse nei­geuse glisse et vient frap­per le cha­let, dévas­tant nombre d’installations sur son pas­sage. Erin, empor­tée, peut se déga­ger avec une che­ville bien abî­mée. Plus de télé­phone, d’électricité ! Les voies de des­cente sont cou­pées, écra­sées.
Puis, un membre du groupe est retrouvé mort, le crâne fra­cassé à l’aide de son ordinateur…

Avec Erin, Ruth Ware apporte le témoi­gnage d’une per­sonne exté­rieure au groupe, étran­gère aux diverses moti­va­tions des membres, ne connais­sant que très impar­fai­te­ment les liens qui peuvent faire inter­agir ces per­sonnes entre elles.
Avec Liz, la per­cep­tion s’affine dans la mesure où elle a été par­tie pre­nante lors de la consti­tu­tion de la société, le déve­lop­pe­ment de l’application Inter­net et les débuts de l’entreprise. Elle a, même si elle n’est pas issue d’un milieu social favo­risé comme les autres, été à l’origine de la réus­site par une inter­ven­tion salu­taire. Et mal­gré son départ, elle reste une per­sonne qui peut faire bas­cu­ler le pro­jet dans un sens défa­vo­rable à celui sou­haité par les diri­geants et action­naires principaux.

Mais tous sont por­teurs de secrets, de trau­ma­tismes, qui influent sur leurs atti­tudes, sur leurs com­por­te­ments sociaux, sur leur capa­cité à agir dans le sens qui leur paraît le plus favo­rable pour eux. Ainsi, mal­gré la situa­tion dra­ma­tique, cer­tains ne se pré­oc­cupent que de l’argent qu’ils pour­raient perdre ou gagner. La ten­sion s’installe et le passé revient en force.
Avec Le Cha­let des dis­pa­rus, la roman­cière livre un récit magni­fique dans le genre avec une gale­rie de pro­ta­go­nistes qui couvre les grandes caté­go­ries de carac­tères humains. Un régal de lecture !

serge per­raud

Ruth Ware, Le Cha­let des dis­pa­rus (One by One), tra­duit de l’anglais (Royaume-Uni) par Héloïse Esquié, fleuve noir, coll. “Thril­lers”, février 2023, 432 p. — 22,90 €.

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