“Le matin dans la chambre les yeux gueule le visage gueule les jambes et le corps tout entier gueule. Le ventre aussi. Mais la langue ? La langue rien. La langue muette tue. Non-gueule la langue. Radicale non-gueule. Le corps alors à inventer la gueule. À la lever battre.” écrit Véronique Daine dans un des quarante-neuf textes en prose qui constituent ce livre.
Rien de lisse en un tel mouvement. D’où ce mot de gueule qui appartient — du moins a priori — plus à la bête qu’à l’être humain. Mais ici l’auteure vocifère avec énergie pour faire sortir ce qui se cache.
Et le « c’est » qui chaque fois propulse le texte indique cette sortie nécessaire pour restaurer le lien entre l’extérieur et l’intérieur en crachant un élément vital non seulement de la tête, boule bien ronde, mais du corps.
jean-paul gavard-perret
Véronique Daine, Amoureusement la gueule, dessins d’Anne Marie Finné, L’herbe qui tremble, 2019, 70 p. — 13,00 €.