Existe dans ce retour au roman par Jacques Richard une sorte d’accomplissement dans une narration au service de la vision et de la sensation : “Tout parle d’une autre voix. C’est là qu’il faut rester”, écrit la narratrice qui succède dans la seconde partie du livre au narrateur. Et les deux se “répondent”.
Les mauvais coucheurs pourraient traiter ce roman en deux temps de l’histoire d’un inceste. Pourtant, jamais Jacques Richard n’a été plus proche d’une vérité non seulement d’apparentement mais d’appartenance à une forme d’impossibilité qu’il s’agit d’une certaine manière de faire fructifier.
Et ce, pour évoquer les passions du coeur, du corps et de l’amour en une suite d’épisodes dialogués ou non dans l’Encore” et l’ “Après” pour que d’une certaine manière non rien ne change mais tout s’arrime à l’existence.
De petites scènes plus ou moins intimes se succèdent avec la force des “choses vues”, comme écrivait Hugo. Ce n’est pas toujours “la vie en rose” tant s’en faut. Et il y a là bien des épreuves d’incommunicabilité à mesure que l’existence va et que les corps jusque là aimés sombrent parfois dans l’indifférence.
Mais tout demeure dans un subtil réapprentissage de la vie — même celle que l’on se détruit. Les êtres (et pas forcément ceux d’un couple) mais surtout une tante et son neveu (narratrice et narrateur) doivent apprendre à ressortir de l’absence et du silence. Mais tout est dit avec pudeur même quand l’éros revient — parfois tant bien quel mal, parfois en une nouvelle assomption.
Jacques Richard a le don de dire “ce qui se passe” de manière allusive et prégnante et c’est pourquoi ce retour à la “fiction” est une réussite. Nul autre que lui pour évoquer le corps, la femme même lorsque son dos se tourne mais que reste un goût d’épice. Là vie est donc là qui résiste avec un peu de mascara au coeur“en l’honneur enttre autres d’une mère que le temps use et abîme.
Mais reste aussi l’amour obstinent même si parfois abstinent au coeur d’un livre qui se veut axe de d’existence. Et même quand toute consistance se défait, les relents d’existence suivent leur cours. L’auteur, son narrateur et sa narratrice apprennent à les rejoindre.
jean-paul gavard-perret
Jacques Richard, La course, EditionOnlit, Bruxelles, 2023, 194 p. — 16,00 €.
Merci à vous Jean-Paul. Lecture d’une rare pénétration. Commentaire à l’avenant. Une rare qualité ! Et ça me fait beaucoup d’honneur.