Frédéric Maget, Notre Colette

Avec amour et discernement

Sous-titré “Un por­trait de Colette par ses lec­trices“, cet ouvrage trans­crit le point de vue de dix femmes – célèbres ou incon­nues – sur la grande roman­cière.
L’auteur explique : “Elles sont dix, elles pour­raient être cent, et sans doute bien davan­tage, comme autant de reflets d’une vie et d’une œuvre, cap­tés à tra­vers le prisme sin­gu­lier d’une époque, d’une sen­si­bi­lité ou d’une esthé­tique. Pui­sant dans les archives – presse, cor­res­pon­dances, mémoires, témoi­gnages -, j’ai tenté de sai­sir par la com­pré­hen­sion, par l’intuition, par l’imagination la trame de ces liens sans cesse faits et défaits“ (p. 13). Autre­ment dit, cha­cun des cha­pitres est basé sur des cita­tions authen­tiques, mais il y a là aussi une part romancée.

L’exer­cice était ris­qué ; le résul­tat est pour­tant une vraie réus­site, car Fré­dé­ric Maget sait rendre cré­dible ce qu’il se per­met d’inventer. Le plus grand avan­tage du por­trait qu’il nous offre de Colette, par lec­trices inter­po­sées, c’est d’être peint avec amour et dis­cer­ne­ment, sans que l’un ne nuise à l’autre. Ainsi, les cha­pitres concer­nant Sido ou Colette de Jou­ve­nel (la fille de la roman­cière) laissent entendre, plus ou moins expli­ci­te­ment, qu’il ne fai­sait pas bon être la mère – même ado­rée et muée en per­son­nage admi­rable – ni l’enfant d’une femme trop absor­bée par son tra­vail et par ses amours pour vrai­ment s’occuper d’autre chose.

Le cha­pitre au sujet d’Olympe Ter­rain, l’institutrice dont Clau­dine à l’école gâcha l’existence, dévoile aussi cer­tains défauts de Colette, mais de façon bien plus cocasse qu’émouvante, Olympe n’ayant pas grand-chose pour s’attirer notre sym­pa­thie.
Parmi les femmes qui ont le plus aimé la femme de lettres, une incon­nue, la prin­cesse Orbe­liani, s’avère aussi atta­chante que tou­chante. Cette vieille dame en mau­vaise santé, endo­lo­rie en per­ma­nence, sup­por­tait son mar­tyre grâce aux livres de Colette, et lui écri­vait pour lui expri­mer sa reconnaissance.

De son côté, Mar­gue­rite Duras a joué, sous l’Occupation, un rôle fort bref, mais impor­tant pour Colette – on laisse aux lec­teurs le plai­sir de le décou­vrir.
Un autre cha­pitre sur­pre­nant, celui sur Mari­lyn Mon­roe, d’où il res­sort qu’elle lisait non seule­ment Colette, mais aussi (les mémoires de) son der­nier mari. Les ciné­philes se réga­le­ront aussi avec le cha­pitre consa­cré à Audrey Hep­burn.

 agathe de lastyns 

Fré­dé­ric Maget, Notre Colette, Flam­ma­rion, février 2023, 350 p. – 23,00 €.

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