Un célèbre devin sur les traces d’un trésor
Ce livre permet à l’auteur de raconter l’histoire de la Provence, d’Aix et plus largement celle d’une partie de la France entre 1536 et 1564. Il débute quand Charles Quint est vaincu jusqu’au moment où Catherine de Médicis passe la main à son fils nouvellement couronné sous le nom de Charles IX.
Mais l’essentiel du propos de Jean d’Aillon reste au niveau de ses personnages et des luttes menées pour résoudre le mystère de ce trésor. Si le romancier fait œuvre d’historien avec son brio habituel, il est également maître dans la construction d’une intrigue fort bien agencée où les dangers, les péripéties et les retournements de situations ne manquent pas.
Ce 12 septembre 1536, Charles Quint, face à son meilleur ami qui agonise dans la cathédrale d’Aix, comprend qu’il a échoué à vaincre le royaume de France. Il décide de rejoindre l’Espagne. Dans cette retraite humiliante, il veut emporter le fruit de ses pillages, une fortune colossale. Salomon Ephraïm, son médecin-astrologue, lui conseille de cacher ce trésor, la route est si peu sûre.
Et il reviendra avec une plus forte armée. Ephraïm organise la cachette, rédige deux quatrains et se sert d’une petite peinture sur cuivre de Raphaël Santi représentant saint Georges luttant contre le dragon, comme support.
Le secret est en partie éventé et le Grand Inquisiteur d’Espagne, Fernando Valdés, veut s’en emparer pour satisfaire son ambition. Or, en Provence, la guerre entre huguenots et catholiques est à son paroxysme. Les massacres succèdent aux massacres orchestrés par les deux camps.
C’est dans ce contexte que Yohan de Vernègues, le filleul de Michel de Notredame — Nostradamus, devenu lieutenant du viguier d’Aix, est demandé par son parrain. Celui-ci a été sollicité par des chanoines d’Orange pour retrouver des reliques volées lors d’un pillage de la cathédrale. Parmi elles, se trouve un petit tableau sur cuivre… Mais, ni Nostradamus, ni Yohan, chargé de cette mission, n’imaginent vers quoi ils vont être entraînés…
Le romancier propose un récit où il ne fait grâce d’aucune exaction, qu’elles soient menées par les tenants de cette nouvelle religion ou par les fervents catholiques. Il expose, sans juger, les horreurs commises par les uns comme par les autres. Et dans cette sauvagerie, il trace le parcours de protagonistes authentiques et imaginaires qui se débattent dans son intrigue.
Autour de Nostradamus, de Catherine de Médicis, il brosse le tableau des trois factions qui se partagent le pouvoir à la cour de France entre les Guise, les Chatillon et les Bourbon. Certes, il reconnaît avoir un peu simplifié les si nombreux écheveaux que forment ceux qui ont une once de pouvoir en Provence à cette période, édulcoré les massacres tant la barbarie était de mise.
Si la partie historique est très riche, Jean d’Aillon signe d’abord un polar mettant en avant des personnages authentiques. Et, c’est une réussite !
serge perraud
Jean d’Aillon, Nostradamus et le dragon de Raphaël, Éditions 10/18 n° 5 828, coll. “Polar”, janvier 2023, 504 p. — 9,10 €.