Ce roman emporte d’abord par la grâce de son écriture. Là où tout pourrait demeurer étouffant, on trouve, sinon une légèreté, du moins un appel d’air au sein de la vie complexe d’une émigrée mexicaine aux Etats-Unis et dont la mort est là dès les première pages.
Cela crée une tension que Catherine Weinzaepflen entretient de manière habile afin de faire jaillir — entre autres — des questions politiques et sociales. C’est aussi tordre le cou à bien des idées fausses sur les émigrés — d’où qu’ils viennent.
L’auteure permet de comprendre comment celle qui fut privée de tout se reconstitue dans l’ailleurs pour avancer dans un monde qui garda, pour et contre, elle une opacité dont l’héroïne vient à bout moins pour elle que pour ses enfants.
Il s’agit donc d’un roman de résistance. Les chutes en chausse-trappes sont nombreuses. Mais la volontaire tient, tendue dans un effort dont le texte témoigne d’une manière juste, précise et parfois implacable là où — d’une vie — lectrices et lecteurs remontent le cours grâce à l’intelligence, la sensibilité et le style de celle qui, quoique romancière, est aussi poète.
Son livre le prouve en en donnant une version où les mots grandissent par leur simplicité même sans faire forcément “pleurer Margot”. L’ambition est bien autre, entre identification, traumatismes et réparation.
jean-paul gavard-perret
Catherine Weinzaepflen, Ismaëla, Editions des Femmes — Antoinette Fouque, Paris, 2023, 128 p. — 15,00 €.