Jan Kounen, Omar Ladgham & Mr Fab, La Tour — tome 02

Ah, le confinement !

En 2042, les humains ont construit quelques rares tours quasi-indestructibles, en totale auto­no­mie. C’est dans ce fleu­ron tech­no­lo­gique euro­péen que se sont réfu­giés les sur­vi­vants de la pan­dé­mie due à une bac­té­rie qui a décimé la quasi-totalité de l’humanité.
En 2072, la tour a vieilli, elle grince, hoquète. Des fonc­tion­na­li­tés tombent en panne faute de soins, de pièces de rechange. Cette tour est gérée par une IA nom­mée Newton.

Au début de ce second volet, Aatami est au volant d’un véhi­cule tout ter­rain en com­pa­gnie de la repré­sen­ta­tion humaine de New­ton. Il est encore à 93 kilo­mètres de son but et dis­pose, avec son sca­phandre, d’une auto­no­mie de plus de neuf heures. Mais la nature a repris ses droits en trente ans et le che­min est semé d’obstacles.
Dix jours aupa­ra­vant, une explo­sion a détruit la serre, fai­sant de nom­breux dégâts et remet­tant en cause l’autonomie ali­men­taire. Lors de l’explosion, il n’y avait que des Intras et ceux-ci sus­pectent les Anciens d’être res­pon­sables. Le malaise s’accentue.
Les rap­ports entre les géné­ra­tions sont de plus en plus conflic­tuels. C’est une des rai­sons qui ont poussé Aatami à ten­ter cette expé­di­tion, la même menée par son père treize ans aupa­ra­vant, rejoindre une autre tour. Son père n’est jamais revenu…

De nom­breux récits d’anticipation prennent des lieux clos comme cadre pour les sur­vi­vants d’une catas­trophe. Dans ces enfer­me­ments volon­taires des psy­choses, des ten­sions s’installent, des conflits éclatent géné­rés par la pro­mis­cuité dans ces espaces fer­més. La Covid a per­mis de vivre, en par­tie, une telle situa­tion. Les consé­quences, après seule­ment quelques semaines, ont été révé­la­trices. Alors ima­gi­nons, avec les scé­na­ristes, ce que cela pour­rait don­ner en trois décen­nies.
De plus s’opposent les Anciens, ceux qui ont connu de la vie d’avant et les Intras, ceux qui sont nés dans la Tour et ne l’ont pas quit­tée. Lorsqu’une zone devient inuti­li­sable parce qu’ouverte sur une atmo­sphère délé­tère, il faut réor­ga­ni­ser les lieux et faire admettre à des occu­pants de devoir déménager.

Les auteurs illus­trent l’immobilisme de l’être humain face aux chan­ge­ments, l’irresponsabilité sociale des indi­vi­dus qui ne pensent qu’à leur petite per­sonne. Ils s’amusent à mettent en cause, dans un tel cadre, une com­mu­nauté reli­gieuse.
Une belle gale­rie de pro­ta­go­nistes fait vivre cette intrigue. Outre l’aventureux Aatami dont est amou­reuse Angela, égé­rie d’un groupe d’Intras, Ingrid qui assure des fonc­tions de direc­tion ou New­ton, que la fré­quen­ta­tion des femmes et des hommes fait deve­nir de plus en plus humain avec tous les défauts que cela peut com­por­ter. Et puis, quelques-uns se révèlent immu­ni­sés contre cette bactérie…

Mr Fab assure un des­sin réa­liste et cou­leurs, le tout de fort belle fac­ture, avec une mise en page agréable par ses rup­tures de pré­sen­ta­tion. Bien que la gale­rie des per­son­nages soit étof­fée, ceux-ci sont faci­le­ment iden­ti­fiables. Les décors inté­rieurs comme exté­rieurs concourent à ren­for­cer le cli­mat tendu du récit. Il signe un tra­vail gra­phique de qua­lité, n’omettant pas les dif­fi­cul­tés phy­siques, les malaises et les acci­dents.
Ce second tome conforte l’intérêt sus­cité par la lec­ture du volume d’introduction.

serge per­raud

Jan Kou­nen & Omar Lad­gham (scé­na­rio), Mr Fab (des­sin et cou­leur), La Tour — tome 02, Glé­nat, coll. “Hors Col­lec­tion”, sep­tembre 2022, 64 p. — 15,50€.

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