Artiste et écrivain inclassable, P-A Gette se joue des étiquettes, brouille les limites entre sciences naturelles, littérature, poésie, mythologie et histoire de l’art. Peinture, sculpture, photographie, texte, tous les médiums sont convoqués pour nous par celui qui propose une lecture où il privilégie, dit-il, « l’enluminure montrant une femme source en décidant de ne pas m’occuper de la symbolique mais de m’en tenir à ce que je voyais ».
Et ce, parce qu’il reste pris dans son goût pour ce qui coule et selon une formule qu’il synthétise ainsi : « Après la contrainte, la liberté après la suspicion, la confiance de tels motifs nus ».
Des femmes sont ainsi devenues des modèles sans l’être vraiment. Elles deviennent des compagnes qui se sont offertes (chastement — il est bon de le préciser) en restant poussées par le désir d’être à la fois vues mais dévoilées.
Et Pierre Facon a dessiné pour sa part, poussé par un même instinct que Gette — mais moins chastement dans le prolongement d’une pratique onaniste — des captures d’écrans de modèle porno live pour dévoiler une intimité qui appartient moins aux égéries inconnues qu’à l’artiste lui-même.
Tout sort, fuse, pulse dans les épissures crayonnées entre nervosité et linéarité, rondeurs. Facon, avec ses clés plastiques, déforme la matière et les images premières. Il faut parfois du temps pour de tels transferts et passages.
Mais c’est un monde intérieur qui s’agite et s’assimile non sans recherche à une adaptation d’usage. Ce travail est exemplaire dans son originalité où le potentiel vague à l’âme est aspiré entre sérieux et fantaisie. Le plaisir est constant.
jean-paul gavard-perret
Pierre Facon, Modèle, sans le savoir, texte de Paul-Armand Gette, Editions Eter SDF, 2022, non paginé.