Claire Tabouret, I am spacious, singing flesh

Les unes et les autres

Les tableaux de Claire Tabou­ret  repré­sentent des corps en confron­ta­tion, des por­traits, des jeunes, des migrants et ses pay­sages sont sou­vent bai­gnés de cou­leurs qui donnent à l’espace un aspect ano­nyme ou impré­cis.
Et dans ses mono­types, Tabou­ret uti­lise les taches fan­tômes lais­sées par la presse pour déve­lop­per la trans­pa­rence et l’opacité dans ses repré­sen­ta­tions du conflit, de la sexua­lité et du désir.

Une nou­velle lec­ture cri­tique des prin­ci­pales dimen­sions de tra­vail est pré­sente dans ce livre suite à l’exposition de l’artiste et au com­mis­sa­riat de Kathryn Weir. Cette nou­velle mono­gra­phie explore de mul­tiples trans­for­ma­tions de soi, des autres, des iden­ti­tés col­lec­tives, luttes et refuges.
Se découvre aussi un dia­logue inat­tendu qui s’établit avec des objets de dévo­tion popu­laires, tirés de col­lec­tions archéo­lo­giques ou litur­giques italiennes.

Cela évoque le seuil ambi­va­lent pré­sent dans la pra­tique de l’artiste. L’ouvrage arti­cule les dif­fé­rentes struc­tures et flui­di­tés pré­sentes au sein de la sub­jec­ti­vité et des iden­ti­tés construites à tra­vers des pein­tures, sculp­tures, vidéos et œuvres sur papier.
Sub­jec­ti­vi­tés errantes et maté­ria­lisme magique créent une fric­tion méta­phy­sique et ins­crivent des asso­cia­tions – intérieur/extérieur, matériel/spirituel, visible/invisible.

Le lan­gage énig­ma­tique du rituel et de la répé­ti­tion dans les uni­vers amnio­tiques de Tabou­ret révèle des états de conscience mys­té­rieux et entre­mêle iden­tité indi­vi­duelle et forces plus vastes. Pro­ces­sus d’incarnation et de trans­fi­gu­ra­tion, créa­tures mons­trueuses et inex­pli­cables, tout est lié par une mira­cu­leuse pos­si­bi­lité de trans­for­ma­tion.
Elle fait dire à l’artiste, comme l’écrit Hélène Cixous, :  “Je suis Chair spa­cieuse chan­tante, sur laquelle s’ente nul sait quel(le) je plus ou moins humain mais d’abord vivant puisqu’en transformation”.

Seules ou en meutes, ses per­son­nages fémi­nins sont moins chas­seuses que chas­sées : en témoignent sou­vent leurs regards apeu­rés. Elles sont aussi les actrices de scènes hors champ que nous voyons avec leurs yeux tout en étant sai­sis par eux.
Et lorsque l’artiste se livre à l’autoportrait, elle mobi­lise un mur entre elle et le regar­deur : est-ce là une fer­me­ture ou un acte auto-préservation ?

jean-paul gavard– perret

Claire Tabou­ret, I am spa­cious, sin­ging flesh, Textes d’Hélène Cixous et Kathryn Weir, Mousse Publi­shing, 2022, 116 p. — 30,00 €.

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