Même dans l’espace rien n’est simple !
L’espace, par sa capacité à enflammer l’imagination, est un terrain fertile pour développer des aventures toutes plus étonnantes les unes que les autres. La guerre entre univers extraterrestres est aussi présente que celles entre nations sur la planète Terre. Après Le Voyage extraordinaire qui mettait en scène deux enfants dans un univers steampunk, Denis-Pierre Filippi et Silvio Camboni partent aux confins de la galaxie.
Différents peuples cohabitent qui pratiquent, comme activité économique, la chasse à des bêtes fabuleuses. Mais comme sur Terre, le gibier a force d’être capturé, se fait plus rare. Celles qui sont encore vivantes le sont dans des endroits moins fréquentés, où la navigation spatiale est dangereuse.
lba, sur son astéroïde privé, tente d’apprivoiser des créatures stellaires, des animaux volants. Elle est dérangée par ses parents appelant en holo. Face à sa mine renfrognée, ils lui demandent de prendre patience car elle est en sécurité où elle est. Son père travaille à éviter un nouveau Grand Conflit. Une alarme retentit. La lutte efficace de Cyll, sa gouvernante, permet une fuite en module. Mais celui-ci est harponné.
Des engins spatiaux traquent des créatures stellaires car elles se négocient un bon prix pour l’élaboration de sérums nanobios. Sur la Flèche, le quota de chasse n’est pas atteint. Aussi, quand ils se font voler une proie par le Sabre, l’animosité est forte.
Sur le Havre, après une bagarre évitée de justesse par l’intervention de Houg, le mécanicien de la Flèche au passé mystérieux, la capitaine du Sabre propose une alliance pour traquer une proie exceptionnelle, repérée dans un espace dangereux. La chasse tourne au désastre. La Flèche perçoit un signal de détresse. Le caisson récupéré contient Alba et Cyll, disparues depuis trois mois.
Elles vont devoir trouver leur place dans cet équipage. Mais quand Alba ose s’aventurer sans scaphandre face à une créature stellaire, elle intrigue fortement. Or…
Autour d’un équipage à peu près soudé, le scénariste intègre une héroïne, qui possède des dons particuliers, dons qui provoquent des réactions inattendues, mais qui risque de mettre tout le groupe en grave danger. Avec un récit dynamique, Filippi propose un nouvel univers qui possède de belles et nombreuses qualités.
Silvio Camboni continue sa fructueuse collaboration avec Denis-Pierre Filippi. Une fois encore, avec son trait précis, efficace, il donne à voir un bel univers. Si la galerie de personnages composée d’humanoïdes et d’extraterrestres est explicite et d’une belle variété, il stupéfie par le cadre et les décors. Il fait preuve d’une imagination fertile reconstituant, par exemple, sur une double page, un port flottant dans l’espace. On ne se lasse pas de le détailler, de repérer des points qui avaient échappé aux précédents regards.
C’est à Francesco Segala qu’il incombe la tâche de mettre des couleurs sur de telles planches. Il donne des couleurs lumineuses, installe une variété de teintes éclatantes dans l’espace, plus austères dans les intérieurs, des évolutions chromatiques intenses.
Avec le premier tome de cette nouvelle série, le duo de créateurs place la barre assez haute pour un récit novateur qui contient tous les ingrédients d’aventures envoûtantes.
serge perraud
Denis-Pierre Filippi (scénario), Silvio Camboni (dessin) & Francesco Segala (couleurs), Prima Spatia — t.01 : L’Héritière, Vents d’Ouest coll. “24x32”, octobre 2022, 56 p. — 14,95 €.